Le 22 avril prochain, ce sera ma fête! Les gens me souhaiteront mille vœux de partout dans le monde. Ils me dédieront des spectacles, des plantations d’arbres, du ramassage de déchets sur le bord des routes, des bricolages avec des objets récupérés, etc. Je me sentirai comme une reine, le temps d’une journée de célébration bien intentionnée. Comment me plaindre d’un jour qui m’est consacré tout entier? Après tout, rares sont celles et ceux qui sont si choyés, non? Malheureusement, cette célébration n’a pas toujours des lendemains qui chantent. 

Une autre fête du genre est la Saint-Valentin en l’honneur de l’amour des cœurs heureux, comme si le sentiment amoureux ne se célébrait qu’une seule fois dans l’année. Les gens ne s’aiment-ils pas à d’autres moments? Est-ce à dire que les gens amoureux ne se déclarent pas leur amour à d’autres moments? Certains prétendent que la Saint-Valentin est une fête commerciale sans intérêt… Pour ma part, j’aime bien la journée qui m’est consacrée le 22 avril! J’aime que les gens me disent qu’ils m’aiment! Je me grise de l’attention qu’on me porte dans les médias à travers le monde. On parle même de moi à l’Assemblée générale des Nations Unies! Je me sens importante. 

Crédit : Isabelle Gilbert

Ce qui m’attriste, c’est que je me sens si seule le reste de l’année. Je ne sens pas la même sollicitude de la part des humains que je côtoie durant les autres mois. Ils m’ignorent ou célèbrent d’autres que moi. Je suis jalouse de la fête des Mères, des Pères et de toutes les autres célébrations en l’honneur des États qui se soucient davantage d’économie, de santé, d’éducation ou des prochaines élections. Pourtant, je crie de toutes mes forces avec des catastrophes naturelles pour attirer l’attention de mes humains. Pour seule réponse, j’obtiens des déchets qui dégèlent au printemps le long des routes ainsi que des industries qui me font éternuer avec leurs émissions polluantes dans l’air et qui versent du poison dans les veines de mes cours d’eau. Vous me direz que cette contamination ne date pas d’hier. Il s’est fait pire lors de la révolution industrielle au 19e siècle. Je réplique qu’à cette époque, les gens ne savaient pas ce qu’on sait aujourd’hui. Hé oui, de nos jours, on SAIT! C’est donc d’autant plus impardonnable de voir ce qui se fait à notre époque. Comme si on étudiait l’histoire pour reproduire les mêmes erreurs. Voyons donc! C’est censé être le contraire, non? 

Malgré mon ardeur, j’échoue à capter l’attention des femmes et des hommes au pouvoir ou de celles et ceux qui dirigent les grandes industries. Certains humains ordinaires font des efforts pour recycler et diminuer leurs déchets, mais c’est l’amour des riches et des dirigeants que je recherche de tout mon cœur. Ce sont EUX qui feront une différence et le Jour de la Terre ne suffira pas à combler mon profond besoin d’affection! Je me sens horriblement trahie par ces séducteurs à qui j’ai accordé ma confiance! 

D’ici à ce que ces individus supposément sages et puissants se réveillent et me disent qu’ils m’aiment à longueur d’année, je vais leur tourner le dos et continuer à brasser la baraque avec des dérangements climatiques de plus en plus créatifs! Voilà! 

Crédit : Isabelle Gilbert

Auteur/trice

Isabelle Gilbert est journaliste bénévole pour L’Indice bohémien depuis 2018. Elle a été coordonnatrice pour le journal communautaire L’Odyssée de Rapide-Danseur de 2000 à 2015 puis de 2017 à 2021. Dès son arrivée en 1999, elle s’est toujours impliquée dans la communauté de Rapide Danseur tout en regardant grandir ses deux beaux enfants. Depuis 2017, elle fait partie du comité organisateur du Rapide Show, un spectacle de variété ayant lieu dans l’église de Rapide-Danseur. Amatrice de plein air et de chant choral, Isabelle aime aussi écrire, coudre et « jouer » de la guitare pour s’accompagner. Depuis 2002, cette touche-à-tout trouve même du temps pour son vrai métier d’enseignante au secondaire!