La connexion Zoom établie, un plafond blanc apparaît à l’écran. L’image bringuebale comme un avion turbulent. Dominic Lafontaine annonce le recadrage de la caméra. La voix est enjouée, rieuse, fraîche. La tête émerge avec sa tignasse, mais une partie du plafond blanc reste visible. L’image est en contre-plongée. Qu’à cela ne tienne! C’est tout sauf barbant de discuter avec cet artiste qui a le vent en poupe. D’ailleurs, il a fait la couverture du dernier numéro de L’Indice bohémien. Et le journal lui consacre un sujet ce mois-ci. 

Si on se rencontre sur Zoom, c’est que le vent l’a emmené à Barcelone. Il y participe à Homesession, un programme d’échange croisé pour artistes : un artiste espagnol vient en Abitibi et, en échange, un artiste abitibien part à Barcelone. Dans le cadre de cette résidence, Dominic Lafontaine crée des fictions en jouant avec l’intelligence artificielle (IA). Il explore des techniques, il pervertit les codes, et ce, pour interroger les limites de l’identité avec le dispositif numérique. Ce faisant, il s’interroge aussi sur le monde, sur la société. Bref, il s’amuse, mais il soulève dans sa démarche le doute sur ce qui paraît évident. Autant dire qu’il fait écho à la pensée d’Aldous Huxley. 

Malgré son absence de la région, l’actualité de Dominic Lafontaine donne l’impression qu’il se trouve à chaque coin de rue. En effet, après avoir proposé PowWOW à la Galerie du Rift (Ville-Marie) et La ville de Tolède aime ses enfants à L’Écart (Rouyn-Noranda), l’artiste présentera les deux expositions au Centre d’exposition d’Amos. 

Le travail de Dominic Lafontaine s’articule autour du jeu avec l’intelligence artificielle. Que pense-t-il des inquiétudes qu’elle provoque? Des débats qui agitent le milieu universitaire et scolaire? Comme il l’explore depuis un an et demi, son idée est arrêtée à ce sujet : il s’agit d’un outil, c’est-à-dire qu’il n’est nullement question d’intelligence. Pour illustrer son propos, il fait une analogie avec l’invention de la photographie ou encore avec les ready-made de Duchamp. Son approche de l’IA s’inscrit dans la même veine. Elle donne des œuvres délicieusement déjantées dans lesquelles l’artiste joue à mélanger histoire de l’art autochtone et nouveaux médias. Son goût pour le mélange, le ludique ne s’arrête pourtant pas à l’usage de l’IA. Son logement à Barcelone a des murs blancs, lisses, propres. Savez-vous la première chose qu’il a faite en y arrivant? Il a écrit des poèmes sur tous les murs. N’est-ce pas déjanté? 


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