Octobre, mois orangé aux feuilles mortes et citrouilles décorées. Mois de lattés, de bière et de tout ce qui réconforte les papilles et l’âme. Octobre est à l’hiver et au temps froid ce que la Porte-du-Nord est aux Hautes-Laurentides : c’est pas encore tout à fait ça, mais on sait que ça approche.

Pendant que Marthe Laverdière, sensation du Web, vous enseigne comment aménager vos hortensias  pour l’hiver depuis les Serres Li-ma en Chaudière-Appalaches, vous saurez qu’à deux rangs de chez vous, des agriculteurs de la région se démènent pour hiverniser des fermes complètes. Notez quel’hivernage est ici mis de l’avant pour finement lier le reste du texte. On ne se cachera pas qu’une ferme, c’est démenant à l’année, au sens figuré.

 

Pour démystifier, en direct de votre sofa, vous pouvez voir tout ça dans votre téléviseur depuis le 12 septembre. Remercions la réalisatrice Émilise Lessard-Therrien qui nous y présente dix familles du Témiscamingue, toutes installées sur les terres labourées de notre lointaine région. La vraie campagne. Là où la trame sonore des autoroutes ne se rend pas. Là où ton voisin le plus proche, c’est la forêt. Là où d’autres réalisateurs verraient un potentiel d’énième remake du Projet Blair. Passé cette campagne, c’est un chalet sans commodités, du camping sauvage à l’état pur, une forêt dense où une bataille féroce nous guette, tel Léonardo contre son ours dans Le Revenant, Oscar et fortune en moins.

 

Le concept, tout comme le nom de la réalisatrice, vous sonne probablement une cloche (de vache) et c’est bien normal : L’Anecdote agricole fût présentée fin mai au Rift de Ville-Marie comme premier long-métrage d’Émilise. Le long format était une demande de la MRC du Témiscamingue qui finançait le projet avec, pour but, de mettre en valeur le métier d’agriculteur.

 

Le titre d’« Anecdote » sonnait alors comme un euphémisme un peu ironique… Documentaire de 75 minutes qui englobe largement le quotidien des producteurs jusqu’à la vie d’entreprise dans un marché international, ça fait une saprée « anecdote », vous comprendrez. Ironie au carré, quand ce format élargi devient le résumé et la bande-annonce pour les épisodes beaucoup plus intimes et complets qu’initialement prévu.

 

Cette première idée : partager à la communauté témiscamienne les anecdotes de dix agriculteurs qui façonnent le paysage (et les garde-mangers) via TV Témis. On retrouve les mêmes personnages que dans le documentaire, mais si, dans celui-ci, tous se partageaient les répliques d’une grande conversation sur le mode de vie agroalimentaire, dans la série, chaque agriculteur a son propre épisode où il expose sa réalité bien particulière.

 

Depuis la mi-septembre, on rencontre chaque semaine un de ces colonisateurs. Ces artistes qui peignent les pantrys québécoises avec, comme seul médium, le sol témiscamien. L’image poétique rurale, on dirait du Fred Pellerin ! Ajoutez un peu de pluie et de soleil sur leurs semis et bam!, ils vous fabriquent de quoi grignoter entre 2 épisodes de Mémoires Vives, et ce, presque aussi facilement qu’Apollo Giovanni vous concocterait des amuse-gueules de luxe avec votre vieux fond de Doritos, mais en plus sain, et avec moins d’extravagance.

 

                       

 

On découvre du talent et des connaissances à en complexer les meilleurs joueurs de Farmville. Des hommes à la force herculéenne en chemises à carreaux qui chevauchent des John Deersur des kilomètres de champs labourés tant sous un soleil de plomb qu’au froid, dans la brume et le gris.

 

En passant par une plantation d’arbres aux allures de forêt, un élevage de chèvres qui vit selon ses propres saisons et un autre de bétail pesant plus d’une demi-tonne la bête, vous découvrirez, jusqu’en novembre, ce que peut créer notre terreau nordique avec le coup de pouce vert de ces artistes biologiques.

 

Malgré l’allure mythique que peuvent prendre les personnages vedettes, vos vaillants et rigoureux voisins sont on ne peut plus humains, sympathiques et généreux, vous voudrez trinquer et lever votre verre de houblon pétillant avec eux, et Émilise le sait d’emblée. À preuve, les 30 minutes de chaque épisode vous laissent juste le temps de déguster votre réconfort en tasse, comme si vous partagiez un bon café avec eux.

 

Mais attention, encore plus que ces humains, c’est leur mode de vie que vous voudrez adopter. Le charme du travail en plein air, du devoir accompli, créer la vie de ses propres mains et voir l’apport tangible (et comestible) que l’on apporte à notre communauté surpasse tous les sourires de Brad Pitt ou le jet set d’une cossue vie citadine. Même le pelletage de purin peut avoir ses lettres de noblesse !

 

Plus qu’un métier, la vie sur une ferme est un véritable héritage culturel, de la même famille… ou pas. Ça reste une vocation qu’on veut transmettre d’une génération à l’autre. Parfois tout de suite adoptée et pour d’autres, apprivoisées. Autant de récits que de fermes visitées, de coups de foudre comme d’essais à tâtons. Pour tous, un seul point commun : l’appel et la plénitude. 

 

Le bien-être des intervenants est contagieux. C’est peut-être la musique simple et l’ambiance décontractée, ou encore le décor étendu et les plans aériens… Vous ne comprendrez pas pourquoi, mais le grand air des Anecdotes agricoles vous ouvrira les bronches à même l’air de votre salon. Sans le vouloir, la réalisatrice recrée une sorte d’« opération séduction »… et s’est fait prendre à son propre jeu : on salue ici Émilise et son amoureux, probablement en plein emménagement sur leur propre lopin de terre !

 

Suivez la page Facebook de TV Témis pour ne manquer aucune Anecdote. Si jamais vous en manquiez une, vous les trouverez en rediffusion sur TVC9 ainsi que sur le Web, dès la semaine suivant l’épisode. On vous invite à redécouvrir votre région, différemment, une histoire à la fois ! Pour découvrir ou redécouvrir le documentaire d’Émilise Lessard-Therrien, il sera présenté gratuitement au Marché Public de Val-d’Or, dans le cadre du Festival de cinéma des gens d’ici, le dimanche 2 octobre à 13 h. \


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