En octobre, Les Volubiles livreront leur 108e représentation, et ce, à leur propre étonnement. Le groupe qui repousse les frontières de la dérision, de l’humour et parfois même du bon gout en Abitibi-Témiscamingue continue de voir croitre son auditoire depuis ses débuts, en 2008. 

Sur scène, ils arrivent costumés et gonflés à bloc, prêts à obéir aux commandes de leur animateur Pascal Binette, qui leur dicte le point de départ et les défis à relever afin de faire rire le public.

« Et je dois dire que le public est plus difficile à impressionner qu’il y a 9 ans », affirme Pascal Binette.

Luc Drolet, Virgil Héroux-Laferté et Pascal Binette ont accepté de rencontrer L’Indice bohémien. Attablés au Gisement, ils insistent d’abord sur ce qu’ils ne sont pas.

« Nous ne sommes pas des improvisateurs », dit Virgil. « Ce n’est pas du théâtre non plus », enchaine Luc. « Et c’était pas parti pour durer 9 ans », ajoute Pascal.

Ce succès local, ils ne l’expliquent pas. Même que l’attrait pour la formule suscite une certaine hantise.

« Les Volubiles, c’est épeurant pour ça. Je pensais que ça marcherait un an ou deux, ça en fait 9 », confie Pascal Binette, qui se définit un peu comme le « Pierre Lalonde pervers » du groupe, à la fois crooneur, mais avec un petit côté, disons, dérangeant. C’est lui qui bat la mesure de ces soirées et qui lance des épreuves aux comédiens, qui doivent s’exécuter sans préparation, sans notes, sans répétition préalable.

Et Binette, comme l’appelle ses complices, ne leur fait pas de cadeau : « Si le public s’amuse, j’en rajoute, je complique les choses.

Si le public s’ennuie ou si je vois que les comédiens sont en train de se planter, je n’hésite pas une seconde et des fois je les engueule en disant : c’est dégueulasse! »

Mais loin de freiner les ardeurs du groupe, ses diatribes contribuent à nourrir les comédiens et font assurément partie du spectacle.

« On peut se planter et on se permet aussi d’avoir les plus gros fous rires… et quand ce n’est pas bon, c’est une passe à Bine! », assure Virgil Héroux-Laferté, vu par ses pairs comme le bon gars, le Adam Sandler du groupe à qui tout peut arriver.

Émilie Villeneuve, la fille du groupe, est la seule personne un peu épargnée par les critiques de Pascal.

« Une fois… Une fois, j’ai été un peu raide avec elle, et j’ai vu 200 regards de désapprobation se tourner vers moi. Quand 200 personnes te haïssent en même temps, tu ne vas plus là », reconnait-il.

Un humour assumé

L’idée des Volubiles a germé au détour d’un match d’improvisation.

« J’étais un peu tanné d’évoluer dans un contexte de compétition, avec des règles strictes », explique Luc Drolet, qui incarne l’antihéros attachant, une sorte de clown qui propage des énormités.

Les membres, l’animateur et les deux musiciens qui les accompagnent, Louis-Philippe Gingras et Benoît Lavergne, se réunissent sur scène, mais ils ne forment pas une « clique » à proprement parler.

« Nous n’avons pas les mêmes vies, pas les mêmes âges. Pascal est prof au secondaire, je travaille à Hydro-Québec derrière un ordi, Émilie Villeneuve est directrice du Festival du cinéma, Olivier est de retour aux études. On ne se voisine pas », résume Luc Drolet.

–          Je pense que tu es venu chez moi une fois en 9 ans, nuance Virgil.

–          Ah oui? Sans doute un accident, lui réplique Luc Drolet.

Une affirmation, une réplique, un grand rire. C’est le rythme naturel des Volubiles.

Faux pas et rétropédalage

L’humour spontané est sans filet et il arrive que certaines blagues soient mal reçues ou que les dents grincent.

« Une personne a déjà quitté précipitamment [la salle et] une autre nous a déjà reproché d’avoir été trop osés durant un spectacle.

 On prend les commentaires », assume Pascal Binette.

Les Volubiles ont tenu des spectacles dans les écoles à un certain moment, mais ceux qu’ils livrent au Petit Théâtre sont résolument 18 ans et plus et sans captation vidéo. Difficile en effet, selon Luc Drolet, d’isoler un sketch ou de sortir certaines blagues de leur contexte. Souvent, une trame se construit durant la soirée et un crescendo se bâtit, de sorte qu’il est difficile d’isoler un numéro pour bien l’apprécier.

« Il faut être là », résume Virgil Héroux-Laferté, qui reconnait que parfois, des thèmes tragiques sont abordés.

« J’ai grandi avec Les Cyniques et Yvon Deschamps et bien des choses ne se font plus aujourd’hui. C’est ce que je trouve dommage.

Pour moi, ça demeure un exutoire. J’ai toujours eu l’impression qu’on pouvait rire de tout, mais on a intellectualisé l’humour et on lui a donné une force qu’il n’a plus. Tous les humoristes ont tous ce même fardeau », soutient Luc Drolet.

Et pour l’avenir?

Comme tout groupe, Les Volubiles caressent leurs propres rêves : tenter de présenter des spectacles dans le nord de l’Ontario, de se promener dans le Pontiac ou même de créer une websérie avec quelques-uns des personnages. Mais ils n’ont aucun projet à Montréal dans leur mire.

« Plusieurs nous ont posé la question, mais non, on n’a aucun intérêt pour aller se produire à Montréal », disent-ils de manière unanime.

De façon plus générale, ils espèrent surtout continuer de satisfaire le public et carburent aux commentaires des gens qui avouent avoir eu des crampes abdominales ou qui ont eu mal aux joues à force de rire.

Les Volubiles ont présenté leurs spectacles aux quatre coins de l’Abitibi et jusqu’à Ville-Marie, au Témiscamingue. S’ils prennent moins la route, ils continuent de monter sur la scène du Petit Théâtre du Vieux Noranda le deuxième vendredi de chaque mois.


Auteur/trice

Lise Millette est journaliste depuis 1998, tant à l'écrit qu'à la radio. Elle a également été présidente de la Fédération professionnelle des journalistes du Québec (FPJQ). En Abitibi-Témiscamingue, elle a été rédactrice en chef de L'Indice bohémien en 2017 et depuis, elle continue de collaborer avec le journal.