Étonnant, éclaté, drôle, déstabilisant : bien futé qui saurait coller une seule étiquette à Dominic Lafontaine! Il cultive ce plaisir de déjouer les prédictions, de surprendre et d’aller exactement là où il sait que personne ne l’attend. Et il s’en amuse, d’ailleurs. 

Dans son exposition La ville de Tolédère aime ses enfants, inaugurée à L’Écart de Rouyn-Noranda en avril et qui se poursuit jusqu’au 28 mai, Dominic Lafontaine repousse les limites de l’intelligence artificielle. « J’utilise des générateurs, je pose des questions, j’envoie des documents et je fais en sorte de brasser tout ça jusqu’à l’absurde. Il peut surgir des éléments vraiment étonnants. Comme cette ville de Tolédère, présentée comme étant en Abitibi-Témiscamingue. Évidemment, ce n’est pas vrai, mais à force de générer, on en vient à tout inventer sur les Tolédéens. » 

À la question, « Et cette intelligence artificielle, elle ne vous effraie pas? », Dominic Lafontaine répond tout simplement, « Moi? Absolument pas! Je joue avec! » 

Dans une démarche où se mêlent le jeu, la ruse et une part de naïveté curieuse, l’artiste entremêle des renseignements, des œuvres et des images dans divers générateurs de données numériques. Il en vient ainsi à inventer un récit qui dissipe complètement les frontières du réel, mais dans une élaboration complexe et confuse où l’on sait tout de cette ville créée de toutes pièces par l’intelligence artificielle (IA). À cette présentation, se greffent des éléments d’arts numériques qui englobent toute la trame, en quelque sorte amalgamée et digérée par l’IA. 

BIENTÔT BARCELONE! 

Cette fascination pour l’interrogation de données, Dominic Lafontaine l’a transportée à Barcelone, plus précisément à Homesession, un programme de résidence pour les artistes internationaux présenté comme un catalyseur de création en art visuel. Il y séjournera tout le mois de mai, avec le concours de la galerie L’Écart où il compte présenter un projet qui viendra mêler les identités catalanes et espagnoles aux dérives de la génération par l’IA. 

Artiste algonquin né à Kirkland Lake, Dominic Lafontaine a étudié à l’Université d’Ottawa où il a obtenu un baccalauréat ès arts. Une issue insoupçonnée pour lui qui se destinait à une formation en ingénierie. Après le décès tragique de ses parents dans un accident de moto, alors qu’il n’a que 15 ans, Dominic Lafontaine se retrouve en quelque sorte seul aux rênes de sa destinée. Après une sortie scolaire au Musée des beaux-arts du Canada à Ottawa, une professeure lui suggère d’embrasser ses talents artistiques. Il opte donc pour cette voie. 

Ses études terminées, c’est la musique qui le happe pendant un long moment, jusqu’à ce qu’on lui demande de réaliser une affiche pour l’organisme Minwashin. Il renoue alors avec les arts visuels et, par la suite, les projets se mettent littéralement à débouler : Biennale Internationale d’Arts Miniatures avec la galerie du Rift de Ville-Marie; expositions à North Bay ainsi qu’au Museum of Northern History (Musée de l’histoire du Nord) de Kirland Lake; participation, avec Jessie Short, à l’exposition Neither One Nor the Other / Ni l’un ni l’autre présentée en partenariat avec l’Office national du film (ONF) à Victoria en Colombie-Britannique; sans compter de nombreuses autres collaborations, tant dans la région qu’à Montréal. 

Dominic Lafontaine s’implique par ailleurs au sein de différentes organisations. On le retrouve aux conseils d’administration de L’Écart et du Rift. Il siège également au comité consultatif sur la diversité de Culture Outaouais en plus d’avoir été vice-président du Conseil des arts Temiskaming Arts Council de New Liskeard et sur le conseil d’administration de TV Témis dans le passé. Autant d’organisations qui tirent parti de l’univers créatif, singulier, mais aussi attachant de Dominic Lafontaine. 


Auteur/trice

Lise Millette est journaliste depuis 1998, tant à l'écrit qu'à la radio. Elle a également été présidente de la Fédération professionnelle des journalistes du Québec (FPJQ). En Abitibi-Témiscamingue, elle a été rédactrice en chef de L'Indice bohémien en 2017 et depuis, elle continue de collaborer avec le journal.