À Val-d’Or, le nom d’Alexandra d’Aoust (née Marquis) est étroitement associé à une foule d’initiatives communautaires. Enseignante et bénévole impliquée sur une multitude de fronts, on la connaît entre autres pour avoir cofondé, en 1983, l’organisme La Piaule de Val-d’Or. Ce qui est peut-être moins connu aujourd’hui, c’est qu’elle a également été l’une des premières femmes à faire le saut en politique municipale à Val-d’Or.

En effet, à l’automne 1972, Alexandra d’Aoust présente sa candidature pour le siège de conseillère numéro 1. En cela, elle fait figure de pionnière, ce qui est souligné par la presse qui, tout en accueillant somme toute favorablement cette candidature, n’échappe pas toujours au sexisme : « Mme d’Aoust retient l’attention parce qu’elle est logique et positive. On ne retrouve point, chez elle, le raisonnement totalement féministe. Elle ne se présente pas aux élections municipales par défi au sexe fort », écrit Jean-Michel Wyl, dans un portrait qu’il lui consacre dans l’Abitibi-Dimanche du 22 octobre 1972.

Un des dossiers de son fonds d’archives conservé à la Société d’histoire et de généalogie de Val-d’Or témoigne de ce chapitre fascinant. Alexandra d’Aoust fait alors partie d’une initiative inédite pour le Val-d’Or de l’époque : l’Équipe Tremblay, une équipe politique municipale menée par Gustave Tremblay et dans laquelle on retrouve, notamment, l’architecte Marcel Monette. L’Équipe Tremblay sera toutefois défaite au profit de candidats indépendants, dont J.-Eugène Bérard, le maire à la plus impressionnante longévité politique de l’histoire de la ville.

Alexandra D’Aoust n’est cependant pas la première à se lancer en politique municipale dans la région valdorienne. De fait, elle a été précédée en cela par Hélène Ringuette-Dorion, qui est élue au conseil de la municipalité de Lac Lemoine en 1967. Cette dernière prendra notamment une part active aux travaux du comité de fusion des municipalités de Bourlamaque, Lac Lemoine et Val-d’Or, qui a lieu en 1968. On la retrouve également candidate à l’élection municipale de Val-d’Or de 1968.

Ce n’est toutefois en 1976 qu’une première femme, Gisèle Wexler, entre au conseil municipal de Val-d’Or (élue avec un record de voix de majorité, soit près de 2 800 voix). Puis, c’est à compter des années 1980 que le visage du conseil municipal change et que l’on voit un nombre plus conséquent de femmes accéder à des postes électifs municipaux, suivant en cela une tendance qui s’affirme à la même période, alors que la proportion de femmes conseillères au Québec passe de 3,8 % en 1980 à 18,4 % en 1990. Plusieurs de ces élues valdoriennes sont issues des milieux de la santé et de l’enseignement, et elles ont l’expérience du communautaire ou du syndicalisme : on pense à Marie St-Germain (1984-1992), à Suzanne Couture (1991-2009) ou encore à Yolette Lévy (1996-2009), notamment. Il faudra cependant attendre près d’un demi-siècle après l’élection de Gisèle Wexler pour voir élire une mairesse, Céline Brindamour, en 2021, marquant par le fait même un nouveau tournant dans l’histoire politique de la ville.


Michaël Pelletier-Lalonde est coordonnateur de la Société d’histoire et de généalogie de Val-d’Or depuis septembre 2022. Créée en 1976, cette dernière a pour mission l’acquisition, le traitement, la conservation et la préservation du patrimoine documentaire témoignant de l’histoire de la région valdorienne. Elle a également pour mandat d’enrichir l’historiographie valdorienne et elle met beaucoup d’efforts dans la diffusion des connaissances historiques et généalogiques.