PHILIPPE MARQUIS 

L’actualité nous bouscule. En tout cas, moi, elle me bouscule. Il m’est très difficile d’oublier que l’on vit dans un univers médiatique déroutant. Par « univers médiatique », j’entends aussi tous les réseaux sociaux, tout ce qui peut diffuser massivement de l’information. Ici, vaut mieux être clair : affirmer que la terre est plate ou qu’une vedette vient de mettre un nouvel album sur le marché reste une nouvelle. Beaucoup de faits sont passés sous silence ou encore, le trop-plein d’actualités fait en sorte qu’elles apparaissent puis disparaissent si vite qu’on ne les retient pas. Et si l’oubli et la surcharge d’infos n’effectuent pas le travail, les moyens de regarder ailleurs ne manquent pas. Ce déluge d’informations est à ce point délirant que, pour éviter de chavirer, on décide de se couper du flot d’actualités. 

Voilà pourquoi il m’arrive souvent d’écrire sur la forêt, les lacs, les rivières ou la beauté qui illuminent vos regards, celle qui donne envie de nous prendre toutes et tous dans nos bras. 

Photographie libre de droits, Pixabay

Allons-y avec un exemple. Il y a quelques semaines, une émission de Radio-Canada – L’épicerie, pour bien la nommer – traitait d’insécurité alimentaire chez les étudiantes et étudiants. Vous avez bien lu! On y apprenait que près d’un tiers des jeunes qui fréquentent nos cégeps et universités, dont le Cégep de l’Abitibi-Témiscamingue et l’Université du Québec en Abitibi-Témiscamingue (UQAT), doivent sauter des repas parce qu’ils n’arrivent pas à payer la nourriture. Ainsi, au moment où nous avons besoin d’une relève très bien préparée à affronter les nombreux défis qui sont les nôtres, une partie de cette relève n’arrive pas à manger de manière convenable. 

La plupart de ces jeunes n’ont pas retenu ces informations puisqu’elles ont aussitôt été ensevelies par d’autres. Peut-être même que, si nous vivions aux États-Unis, notre président se serait empressé de dire qu’il s’agit là d’une fausse nouvelle! Mais point n’est nécessaire d’avoir un tel être au gouvernement pour effacer de nos mémoires ce qui touche de nombreux jeunes près de nous, le roulement des actualités y suffit amplement. 

Pour ne traiter que de notre région, par ailleurs fort privilégiée comparée au reste de la planète, on finit, il me semble, par ne plus se rappeler certains faits. Je pense au nombre de personnes demandant de l’aide alimentaire qui ne cesse d’augmenter. On pourrait aussi évoquer le nombre de personnes sans logement ou qui n’arrivent plus à boucler leur budget ainsi que la pénurie de personnel en santé et dans les services sociaux. La liste est bien plus longue… Derrière toutes ces évocations, il y a des humains, des milliers de nos semblables, des personnes vers qui les caméras ne se tournent presque jamais. 

Il est probable que ce regard paraisse sombre. Je ne crois pourtant que révéler la réalité. Celle cachée par les hauts et les bas des marchés boursiers que l’on nous montre tous les soirs aux journaux télévisés. Celle invisible et inimaginable lorsque l’on observe le prix de l’or qui bat record après record. Celle dont notre nouveau ministre régional ne nous parle jamais. 


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