En mars 1686, Pierre chevalier de Troyes et une centaine d’hommes quittent Montréal dans le but de déloger les Anglais de la baie James. Afin de les surprendre, ils passent par l’intérieur des terres. Il s’agit d’une expédition que très peu d’Européens avaient tentée jusque-là. Sans en être certains, on présume que le chevalier de Troyes a obtenu la permission des Anicinabek de traverser leur territoire, de même que leur aide à titre de guides. Il est plus que probable que le chevalier de Troyes se serait perdu sans eux et que l’objectif de l’expédition n’aurait jamais été atteint.

HISTOIRE D’UN PREMIER CONTACT DOCUMENTÉ

On ne sait pas s’il s’agit du premier contact entre Européens et Anicinabek à avoir eu lieu sur le futur territoire de la Ville de Rouyn-Noranda. Toutefois, il s’agit assurément du premier contact documenté. Au cours de son voyage, le chevalier de Troyes tient un journal de son expédition. On apprend par celui-ci que les membres de l’expédition ont remonté en canot la rivière des Outaouais avant de s’arrêter au poste de traite du lac Témiscamingue, puis ils ont successivement remonté les rivières Blanche, Wendigo et Larder.

UNE PREMIÈRE RENCONTRE MARQUÉE PAR L’ENTRAIDE

C’est le 30 mai 1686, deux mois après leur départ, que le chevalier de Troyes et ses hommes mettent le pied à l’intérieur des limites administratives de la future Ville de Rouyn-Noranda. Ils arrivent du lac Raven et s’enfuient d’un feu de forêt qu’ils ont eux-mêmes allumé par accident. Très rapidement, ils portagent et passent par les lacs Buies, Drapeau et Durand. Entre le lac Durand et le lac Foudras, le feu les rattrape et ils passent près d’être brulés vifs. Le chevalier de Troyes écrit :

« Nous nous vimes contraints à courir de toutes nos forces au travers le bois tout embrazé, dont le feu nous [serra] de si près qu’une menche de ma chemise fut brûlée par une confusion d’étincelles et de charbons qui tomboient continuellement. […] Nous rencontrâmes [un groupe d’autochtones], en entrant dans la prairie, qui nous aidèrent beaucoup à sauver nos hardes et autres choses de l’embarquement. » (Caron, 1918)

Après avoir franchi une distance de 5 lieues (24 km) et effectué 8 portages, ils terminent cette journée en campant au nord du lac Opasatica. La traversée du territoire de Rouyn-Noranda leur prend environ quatre jours (du 30 mai au 2 juin). Ils partent par la rivière Kanasuta et continuent leur périple jusqu’à la baie James où ils prennent possession de trois postes de traite anglais.

Du point de vue de la majorité des Eurodescendants, la journée du 30 mai 1686 a eu très peu d’impacts significatifs et durables sur le développement de Rouyn-Noranda. Toutefois, pour les membres des Premières Nations, cette date marque symboliquement le début de la présence des Allochtones sur leur territoire et le début d’une relation inégalitaire. Sans qu’il y ait de cause à effet, il s’agit du premier chaînon d’une série d’événements locaux et nationaux qui laisseront des traumatismes chez les Anicinabek. (Bousquet, 2016).