Il en a coulé de l’eau sous les ponts depuis le bar Le Rafiot de Val-d’Or, dont Justin St-Pierre était propriétaire et où ont défilé des centaines de musiciens. Depuis, le guitariste a roulé sa bosse sur différents continents puis, suivant son cœur, s’est posé dans le sud de la France avec sa muse, en 2017. Là-bas, il amuse à sa guise ses doigts sur sa guitare. Confiné et heureux dans un petit village entouré de vignobles où existe le Bord du Monde, un petit bistro qui lui rappelle le Rafiot et qu’il surnomme le « Bout du bar du bout du monde », il se sent en terrain connu.
Dans les dernières années, pendant une tournée qui l’a mené en France, en Belgique, en Allemagne et aux Pays-Bas, il a su créer des amitiés et des contacts, notamment avec Sotos Bakas avec qui, en mars dernier, il devait enregistrer son album. Bakas est un ingénieur de son qui fait vibrer la musique sur une île aux abords d’Athènes. Confinement oblige, l’aventure n’a pu se réaliser. Mais Justin, homme plein de ressources, même si le temps s’est suspendu, a mélangé ses nouvelles musiques, est retourné dans son répertoire et a, je crois bien, remis ses pendules à l’heure. Tellement qu’il a mis à jour des chansons où il nous offre sa voix, celle qui lui donne tant de doute et d’effroi. Comprenez, chanter est chaque fois un combat pour lui, mais certainement une délivrance aussi, ce genre de petites victoires quotidiennes. Certes, son nouvel album n’est pas tangible entre nos mains, mais ses doigts, sa guitare et son instinct continuent de vibrer.
Dans son village du sud de la France nommé Salvagnac, il prend le temps de vivre et de comprendre le parcours qu’il a accompli, d’être en accord avec ses propres valeurs et de devenir artisan de son propre bonheur. Justin avait déjà pour lui l’apprentissage de la lutherie à Montréal et la technique de ses doigts sur la guitare, mais il voulait mieux connaître cet instrument qu’il maîtrise avec brio. Le but à la base de ce voyage en France était de se perfectionner avec les meilleurs. Il faut comprendre que le jeu de guitare en France, depuis Django Reinhardt, est devenu très populaire. Tous cherchent à faire le meilleur fingerstyle. Comme dans tous les domaines, il y a ceux qui essaient d’impressionner et ceux qui veulent habiter l’espace. Justin a bien compris l’ampleur de cet espace créé par ses cordes de guitare, et que l’émotion parvient à remplir.
À Salvagnac, il existe un homme qui prend soin de son cœur, de ses dix doigts, de la femme qu’il aime et de cette petite voix intérieure qu’il nous offre à chacune de ses prestations… De la joie, du bonheur, même parfois des pleurs, mais toujours des émotions, c’est sans doute ce qui attend les spectateurs qui assisteront à sa tournée dans la région, du 1er au 10 décembre prochains.