J’ai attendu le plus tard possible avant d’envoyer ma chronique. J’attendais les derniers détails de cette crise de la COVID-19 qui met littéralement la planète à genoux. L’Asie, l’Europe et l’Amérique s’isolent. Les frontières et les écoles ferment, on nous demande de rester à la maison et de limiter nos déplacements. Des mots reviennent dans notre vocabulaire : pénurie, confinement, rationnement. Ici, au Québec, il faut le reconnaître le travail remarquable du premier ministre Legault. Il fait preuve de leadership et de calme. Il incarne l’État. Il parle clairement et sincèrement, il montre le chemin et les Québécois, en général, le suivent. Je ne parle pas de Trudeau, errant et décevant. Quelques lumières apparaissent dans ce ciel gris foncé : la Russie et la Chine semblent avoir éradiqué l’épidémie, on travaille sur des traitements et des vaccins qui semblent efficaces.

Il y aura un après COVID-19. Il sera difficile de revenir comme avant, comme si de rien n’était. Nos modes de vie et nos rapports au monde seront changés. Permettez-moi de penser à l’après-virus, même si, en ce matin du 18 mars, des gens sont encore malades et d’autres mourront partout.

C’est le retour de l’État vers qui se tournent tous les regards en cas de crise. Les libertariens devront rester cachés un bon bout de temps. C’est l’État qui protège, qui soigne, qui paie. Même les entreprises, bien contentes de crier à la liberté d’entreprendre et contre les impôts trop élevés – même elles! – demandent au gouvernement de les aider. L’idée de frontière revient aussi. J’aime les mots de Jean-François Kahn, vieux journaliste au regard lucide : « Il était ringard de ne pas célébrer l’ouverture à tout vent. Il est devenu irresponsable de ne pas exiger la fermeture à double tour. » Quand on revient aux fondamentaux comme la vie, la mort ou la guerre et la paix, les grandes organisations (ONU, G7, Union européenne) sont aux abonnés absents. C’est l’État-nation qui fait le travail.

C’est notre rapport à la Chine et à la mondialisation qui sera remis en question aussi. Cette crise met en lumière notre dépendance à la Chine, devenue l’atelier du monde, d’où nous proviennent la grande partie de nos médicaments, nos produits technos, les pièces de rechange de nos machines. La Chine, c’est 35 % de la production mondiale. C’est trop! Ah! Mais la modernité, c’était le partage des fonctions, c’était partager la production partout. Erreur. Il faudra revenir aux productions locales et nationales, aux circuits courts et à une consommation moins effrénée. À des voyages en Gaspésie et au Lac-Saint-Jean aussi.

Puis, finalement, on aura à inventer des solidarités nouvelles. Retrouver la valeur et l’importance de l’ami et du voisin de palier. Aider son prochain. Il est bien d’aller creuser des puits au Togo, mais la vieille dame au coin de notre rue a peut-être besoin d’aide pour faire ses courses. On reviendra peut-être à plus de simplicité et d’authenticité.

À un peu plus de chacun chez soi?


Auteur/trice

Abitibien d’adoption, Valdorien depuis 20 ans, Dominic Ruel est enseignant en histoire et géographie au secondaire. Il contribue à L’Indice bohémien par ses chroniques depuis les tout débuts, en 2009. Il a été président du CA de 2015 à 2017. Il a milité en politique, fait un peu de radio, s’est impliqué sur le Conseil de son quartier et a siégé sur le CA du FRIMAT. Il aime la lecture et rêve d’écrire un roman ou un essai un jour. Il est surtout père de trois enfants.