Bien installée dans son nid de création à Palmarolle en Abitibi-Ouest, la formation Saltarello continue son voyage musical à la croisée des influences du Nord. En mai prochain, au Petit Théâtre du Vieux Noranda, elle lancera Unuuaq, son 7e album. Le titre, qui signifie nuit en inuktitut, fait écho au processus de création de ce nouvel opus inspiré par le calme de la nuit.

C’est à Rouyn-Noranda, en 2000, que Saltarello voit le jour, fondé par Julie Pomerleau et Luc Lafrenière. Avec le temps, le groupe s’est enrichi de nouveaux collaborateurs qui apportent différentes influences musicales. En plus de chanter, Julie joue des synthétiseurs, de la harpe celtique et de l’harmonium indien. Luc est à la vielle à roue, au tympanon, au dulcimer, aux flûtes et à la voix, accompagné par Jessica Poirier aux voix. En 2011, le bassiste Sydney Boutin a rejoint la formation, suivi ensuite par Sarah Lesage aux différents violons. Enfin, depuis bientôt quatre ans, Pierre Drainville joue des cordes pincées : bouzouki, mandocello, mandoline et guitares. Inutile de dire qu’une tournée sur la route demande autant de planification qu’un voyage avec une famille nombreuse!

On ne peut parler de Salterello sans chercher à comprendre ce qui nourrit leur recherche musicale. « Depuis le début, on voulait utiliser les instruments anciens, mais dans une forme actuelle, explique Julie Pomerleau. C’est en 2010 qu’on a vraiment trouvé notre son : beaucoup d’influences des musiques celtiques et scandinaves et du nord de l’Europe, maintenant mixées avec nos racines autochtones d’ici. On aime créer beaucoup de métissages dans les sonorités. » Toutefois, même s’ils s’abreuvent à différents folklores musicaux, les membres de Saltarello composent toujours du matériel original, hypnotique et intemporel.

VOYAGE MUSICAL DANS L’ESPACE ET LE TEMPS

Le premier album de Saltarello, O Pietas, proposait une musique néo-sacrée aux sonorités grégoriennes et très éthérées. Le deuxième opus intitulé Humana offrait déjà à son public des saveurs venues d’Asie et du Moyen-Orient : cithare et doudouk arménien se marient à la musique électronique. Le troisième album paru en 2008, Forgotten passage, est nourri d’un voyage de deux mois au Maroc à étudier les musiques africaines et berbères. Ayant eu l’occasion d’y faire des rencontres enrichissantes et de jouer avec des groupes locaux, l’album a un nouveau son où fusionnent les voix et les rythmes du monde.

2011 marque un genre de retour aux sources pour Saltarello. L’album Nine worlds revient à l’essence de sa recherche musicale puisée dans le Moyen-Âge, agrémentée cette fois par une collaboration spéciale avec Daniel Thonon, luthier et spécialiste de la scène folklorique et de la vielle à roue. Viennent ensuite Dance of the muses en 2013, beaucoup plus électro, et Cliff of the dawn en 2015, où on entend pour la première fois les influences de la musique autochtone et des chants de gorge inuits métissés avec les influences païennes de l’Europe du Nord. Pendant ce temps, entre les tournées et les périodes de création, le groupe continue d’offrir des ateliers de musique médiévale dans les écoles de la province et dans le Nord-du-Québec.

Unuuaq

Le choix d’un titre en langue inuktitut n’est pas le fruit du hasard. « Nous avons beaucoup travaillé avec des enfants inuits dans des ateliers scolaires et en enseignement dans le Nord-du-Québec, à la Commission scolaire de la Baie James, raconte Julie Pomerleau. Les enfants participent en chantant ou en jouant des percussions. Ils sont parfois distants au début, mais un moment donné quelque chose se passe. La musique est un langage qui permet des échanges merveilleux, malgré les barrières de langue qui peuvent exister. » La nordicité est très présente dans l’univers musical de Saltarello; ce n’est donc pas étonnant que la culture de notre nord s’invite dans sa création, où musiques et croyances ont plus à partager qu’à opposer.

Unuuaq, c’est la nuit, un thème qui imprègne chacune des dix pièces du nouvel album. « Dans les célébrations païennes, la nuit est très présente. L’obscurité et la lumière font partie de la roue de la vie. C’est aussi une recherche spirituelle, un questionnement sur le rythme de la vie qui bouscule parfois », confie Julie Pomerleau. Afin de bien transmettre l’esprit derrière le processus, le groupe a créé son album dans le calme de l’Abitibi. « Nous avons travaillé avec les éléments de la nature, sur notre terre, dans notre forêt. Nous composions le jour; le soir, on réécoutait le matériel dans le calme. Là, ça passe ou ça casse! », affirme-t-elle, ajoutant qu’il a fallu beaucoup d’élagage pour ne garder que 10 pièces sur les 32 que le groupe avait au départ.

Le lancement de l’album se fera à Rouyn-Noranda, mais Saltarello prendra les routes du Québec et de l’Ontario dans l’été à venir pour présenter au public son nouveau matériel. Un spectacle de réseautage donné à St-John en 2018 devant Contact East, le réseau des diffuseurs de spectacle de l’est du Canada, lui a permis de décrocher des invitations pour l’Europe, ce qui les mènera à jouer en Écosse en 2020. Une tournée est aussi prévue dans le réseau des maisons de la culture sur l’île de Montréal et à l’extérieur. Si Saltarello voyage autant, c’est que sa musique n’a pas de frontière.


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