LISE MILLETTE

Les premières traces du bandalore, ces deux petits disques de bois réunis par le centre dans lequel une ficelle est posée pour en faire un jouet d’adresse, apparaissent sur des poteries de la Grèce antique 500 ans avant Jésus-Christ. Le jouet qui va et vient s’est propagé en Chine, où on retrouve le diabolo, puis dans les Philippines, avant d’être commercialisé sous le nom de yoyo par l’Américain Donald Duncan dans les années 1930. 

En 1962, pas moins de 45 millions de yoyos ont été vendus en une seule année. Un véritable succès commercial. Ce nom est en fait une adaptation d’une langue parlée aux Philippes où la prononciation « yoyo » peut être traduite par les mots « viens-viens ». 

Il semble également que ce soit en regardant un caméléon s’attaquer à ses proies, en déroulant la langue, que la source d’inspiration de l’objet a été trouvée. Les chasseurs de l’époque auraient attaché des pierres au bout d’une longue corde et du haut d’un arbre, ils pouvaient ainsi toucher leurs cibles, à bonne portée de tout tir raté. 

En 1985, la fascination pour le yoyo se poursuit à des milliers de kilomètres de la surface terrestre. La mission Discovery, déployée en avril 1985, apporte à son bord différents jouets dans l’objectif de mesurer les effets de l’absence de gravité dans un contexte ludique, mais plus officiellement, pour réaliser des expériences de physique. Dans le lot de jouets se trouvaient un Slinky, un yoyo, une sorte de toupie et une petite voiture. Des images vidéo de l’expérience existent toujours et révèlent que, dans l’espace, la boucle lente négociée par le yoyo qui voit sa corde se dérouler est d’une pure poésie. 

Il peut y avoir une certaine satisfaction à regarder le disque monter et descendre en s’enroulant. La répétition présente un aspect contemplatif, jusqu’à ce que le cycle soit brisé. 

LE YOYO UTILISÉ COMME ARME? 

Outre les chasseurs d’un autre temps qui avaient imaginé cette pierre attachée à une corde, il ne semble pas y avoir de véritable usage d’autodéfense au yoyo, bien que cette option ait été suggérée dans des films d’action. Le degré de maîtrise dans l’art de renverser le poignet n’est pas à la portée de n’importe qui… et sans doute qu’en situation de menace imminente, le facteur de stress pourrait bien s’inviter dans les manœuvres complexes qui deviendraient vite périlleuses pour la personne qui manipule le disque. 

Si l’objet est ludique et permet d’user d’agilité pour négocier de multiples figures et tours amusants, il en découle une série d’expressions pas toujours flatteuses. L’effet yoyo est associé aux impacts négatifs des mouvements de haut en bas. L’effet yoyo s’observe notamment avec les régimes amaigrissants, sur les marchés boursiers lors de cycles de fluctuations rapides ou répétitives. En anglais, traiter une personne de yoyo, se résume à la traiter de stupide, alors qu’en France, l’expression « yoyoter de la touffe » (ou de la toiture ou de la cafetière selon la variante) est une manière de dire qu’une personne est déraisonnable ou qu’elle dit n’importe quoi. 

On pourrait aussi s’intéresser aux conséquences de jouer au yoyo, c’est-à-dire de prendre une décision et la dédire le jour suivant. Jouer au yoyo est possible dans de multiples sphères, délibérément ou non. S’ensuivent déstabilisation, chaos et instabilité qui soufflent le chaud et le froid. 

Dans une relation, jouer au yoyo peut rapidement mener à une perte de confiance, provoquer un intérêt au repli, à serrer les rangs ou même à préparer la riposte ou le conflit. 

Après un certain temps, on se lasse du yoyo. L’amusement ne dure pas nécessairement. 

Peut-être faut-il rappeler que le yoyo est une marque déposée par Donald Duncan. Il ne s’agit pas d’une arme ni d’une manière de penser ou de vivre ensemble… 


Auteur/trice

Lise Millette est journaliste depuis 1998, tant à l'écrit qu'à la radio. Elle a également été présidente de la Fédération professionnelle des journalistes du Québec (FPJQ). En Abitibi-Témiscamingue, elle a été rédactrice en chef de L'Indice bohémien en 2017 et depuis, elle continue de collaborer avec le journal.