JEAN LAPOINTE, BIOLOGISTE, M. SC.
Bien qu’il y ait relativement peu de photographes animaliers professionnels au Québec, on compte un grand nombre de passionnés d’observation de la faune qui exercent également cette activité en tant que loisir. Ces photographes amateurs peuvent utiliser leur appareil photo pour capturer des moments uniques et les documenter. Lorsqu’il s’agit d’une espèce rare, il est crucial d’ajouter des photos aux notes de terrain, car elles permettront aux experts de confirmer l’identité de l’animal. Par exemple, la découverte d’une chevêche des terriers par Johanne Gagné dans la région de Preissac en 2019 a été corroborée par des clichés remarquables, bien que l’aire de répartition de cette espèce s’étende principalement sur le centre et l’ouest des États-Unis.
Par ailleurs, le désir de capturer sur pellicule des moments clés de notre existence peut parfois nous amener à enfreindre les règles éthiques propres aux photographes animaliers. À ce moment-là, il faut se rappeler que la simple découverte d’un nid d’oiseaux peut conduire à la perte de la nichée si on s’approche trop du nid. Les prédateurs peuvent suivre l’odeur laissée par les photographes pour se rendre au nid et se repaître d’un repas facilement trouvé. D’autres gestes d’observateurs ou de photographes peuvent également être préjudiciables aux espèces animales et à leurs habitats.
Heureusement, certains magazines spécialisés en photographie animalière ainsi que des associations d’ornithologues amateurs servent de modèles en matière d’éthique pour les photographes animaliers et les passionnés d’observation de la faune. Beaucoup de sensibilisation et d’éducation sont nécessaires pour changer les pratiques, puisque le comportement de la personne dépend de ses connaissances et de son expérience.
Le photographe animalier doit respecter de grandes règles dans la pratique de son activité. Il lui faut tout d’abord se conformer à l’ensemble des lois, des règlements et des exigences en matière de conservation. Au Québec, la Loi sur la conservation et la mise en valeur de la faune (chapitre C-61.1) et son Règlement sur les cas et conditions pour attirer ou nourrir un animal ou une catégorie d’animaux (chapitre C-61.1, r. 8.1) permettent à quelqu’un d’attirer, de tenter d’attirer, de nourrir ou de tenter de nourrir un animal à des fins d’observation de la faune. Cette personne peut donc également photographier les animaux qu’elle a attirés.
De plus, les photographes ne devraient pas utiliser d’appâts vivants pour attirer, manipuler ou contrôler leurs sujets. Ils ne devraient pas les harceler ni forcer l’interaction avec eux. Les sujets photographiés ne devraient pas non plus sembler stressés par la présence du photographe.
Il est conseillé de ne pas se rapprocher trop près d’un animal lors de la prise de photos. Cela peut causer du stress à l’animal et même lui être préjudiciable. À moins de vouloir capter des images d’insectes, d’araignées, d’amphibiens, de reptiles ou d’autres petits sujets, il n’est pas recommandé d’utiliser un objectif macro. De plus, un objectif grand-angle est peu adapté à la photographie animalière. Il est préférable d’utiliser un objectif fixe ou un zoom dont la longueur focale est d’au moins 400 à 500 mm, ce qui permet au photographe de maintenir une distance acceptable avec son sujet.
Aujourd’hui, certains dispositifs offrent au photographe la possibilité de contrôler son appareil à distance. Aussi, l’appareil peut être fixé sur un trépied équipé d’une tête orientable, ce qui permet de corriger la visée de l’objectif.
Pour la photographie de sujets nocturnes, il faut éviter d’utiliser le flash, car une forte intensité lumineuse peut par exemple perturber les habitudes de chasse et de navigation des chauves-souris, et même les désorienter et leur causer du stress.
Finalement, les photographes devraient éviter de perturber l’habitat lorsqu’ils se trouvent dans un environnement naturel. En effet, la présence d’une espèce dans un milieu, ainsi que le succès de sa reproduction dépendent beaucoup de la qualité de son habitat. Prendre les moyens pour éviter d’altérer la qualité de l’habitat d’une espèce est un pas important pour préserver l’espèce elle-même.