Le groupe Ferøx Nømen ne déteste pas les hommes. Sauf que les quatre ados rebelles, nouvelles venues sur la scène lasarroise, ont un message pour les personnes qui banalisent la mecsplication (mansplaining) et le patriarcat. « On a des choses à dire et on va les dire, que vous aimiez ou non », scande la bassiste Jayne, alias Jay.
Sans surprise, la moitié des six compositions du groupe forment une ode au féminisme. Un féminisme nouveau, créatif et à l’image de jeunes femmes de 16-17 ans qui dénoncent la sexualisation précoce des filles et le machisme de certains hommes.
« On a de grandes gueules, poursuit la chanteuse Elsa. Notre première chanson, I Hate You, parle des garçons, surtout les ados à l’école, qui font des commentaires sur tout ce que tu fais, comme “ton chandail est laid” ou “tu chantes mal” […] Le monde est tellement négatif. Arrêtez de juger les autres. Vous êtes normal quand vous restez vous-mêmes. »
EN PREMIÈRE PARTIE « D’ADULTES »
Mais en ce samedi frisquet de la fin mars, le féminisme de Jay et d’Elsa cache une certaine nervosité. Réunis à la Punk House de Rouyn-Noranda, les deux comparses s’entassent dans un petit local en désordre avec Alice et Marylou, qui les accompagnent à la batterie et à la guitare.
Les quatre ados font aujourd’hui la première partie de Guhn Twei lors du spectacle hardcore du mois. À guichet fermé, en prime. Ce sont des adultes, s’exclament les quatre filles, avant qu’émerge la voix d’Alice, quelque peu intimidée. « J’ai envie de vomir », admet-elle.
La Punk House n’est pas antiféministe – loin de là –, mais il reste que le groupe s’aventure dans un monde d’hommes, avec pour arme principale un son oscillant entre le punk et le rock britanniques, et qui reste très influencé par The Cranberries, The Offspring, The Ramones et Nirvana.
La seule note dissonante vient de la guitariste Marylou, alias Mylou. « Je l’ai jamais entendu, je suis très curieuse », s’emballe-t-elle. Son amour de la scène est né à force de prestations, notamment celle de Ferøx Nømen au défunt AlienFest de La Sarre, en 2023.
« Je vois notre groupe comme une famille, révèle la guitariste. Une fois que tu embarques sur la scène, tu réalises que tu es tombée en amour avec le monde de la musique. Les filles, quand elles m’ont demandé de rejoindre le groupe, elles m’ont sauvé un peu, je n’allais vraiment pas bien. Ça va beaucoup mieux depuis que je les ai rencontrées. »
AMOUREUSES DE LA SCÈNE
Les filles, qui viennent de terminer leur test de son, enchaînent les coups d’œil sur leur cellulaire. Le cadran ne ment pas. 19 h 30 : elles doivent commencer à jouer.
Un peu déstabilisée par la proximité du public (« Je regardais le monde dans les yeux », dira plus tard Elsa), Ferøx Nømen a pris pleinement son aise pendant leur reprise de Zombie de The Cranberries.
La prestation terminée, Jay, Elsa et Alice se rangent à l’avis de Mylou. Difficile de prédire si le public – des jeunes hommes essentiellement – a été conquis par leur message, mais qu’importe. Rien n’empêche maintenant les filles de ressentir le plaisir de la scène.
« T’es punk ou t’es pas punk », concluent les filles, avant de retourner dans la foule pour profiter de la musique, de l’adrénaline du show et pour avoir du « fun en famille ».