L’industrie culturelle n’est certainement pas la première qui nous vient en tête au moment de s’interroger sur l’impact environnemental des entreprises. Cependant, dans un contexte de crise climatique et de biodiversité, qui exige la mobilisation de l’ensemble de la société, le secteur des arts et de la culture se penche aussi sur des solutions.
Si l’art est l’expression de notre créativité, celle-ci est doublement sollicitée lorsqu’il faut se débrouiller avec autre chose que le matériel standard acheté au magasin. En portant un regard neuf sur le vieux, un monde de ressources et de solutions de rechange au prêt-à-créer s’ouvre à nous. Même s’il s’agit d’un processus chronophage, il est gratifiant de dénicher l’article insoupçonné ou la composante parfaite qui, autrement, se destinait aux rebuts.
C’est en fouillant les boutiques de produits usagers et les écocentres, ou même en s’adonnant à l’écojogging (plogging) que la peintre et militante performative Véronique Doucet garnit son atelier : « Je suis fascinée par les résidus. Encore hier, j’ai pigé dans une poubelle pour en retirer un item qui, déjà, est intégré à l’un de mes projets. Pour moi, ce n’est pas seulement un geste individuel de réduction des déchets, c’est aussi mon sujet. Ces éléments me permettent d’aborder notre surconsommation et l’équilibre entre la nature et la culture. »
L’appel à tous sur les réseaux sociaux est une autre stratégie gagnante pour rassembler du matériel de seconde main, comme le raconte l’artiste rouynorandienne : « En réponse à une simple demande partagée sur Facebook, des centaines de personnes ont bien voulu m’apporter leurs bas “pas d’ami”, c’est-à-dire les bas solos dont on a perdu le double, dans le cadre d’un projet d’œuvre éphémère. »
La récupération est de plus en plus valorisée dans toutes les disciplines, que ce soit au théâtre, sur les plateaux de tournage ou même dans les musées. Carmelle Adam, directrice administrative et artistique du VOART − Centre d’exposition de Val-d’Or, signale qu’il sera bientôt obligatoire pour les organisations culturelles de s’engager dans une démarche de développement durable pour obtenir le soutien du Conseil des arts et des lettres du Québec (CALQ). Heureusement, en Abitibi-Témiscamingue, nous avons parfois déjà une longueur d’avance. « Ici, dans la région, nous n’avons pas les mêmes moyens que dans les grands centres. Réutiliser, transformer, partager les équipements, c’est notre réflexe depuis toujours, par nécessité. Très peu de matériel se retrouve jeté. S’il ne sert plus au centre d’exposition, il sera offert pour l’animation d’activités éducatives ou donné à la communauté », explique Mme Adam.
Elle confie toutefois que les options plus écoresponsables en matière de matériel d’art sont peu accessibles. On trouve sur le marché des peintures, vernis, colles et pigments dont les ingrédients sont plus naturels. Malheureusement, ces derniers demeurent marginaux et leur prix est souvent prohibitif. Des recettes maison existent, mais peuvent difficilement s’adapter à un usage à grande échelle.
Néanmoins, le milieu évolue, tant sur le plan de la réduction des déchets que de la diminution des gaz à effet de serre (GES), notamment grâce à des programmes et à des accréditations en développement durable spécifiquement destinés aux arts de la scène, aux tournées, aux productions audiovisuelles ou aux arts visuels. Après le Royaume-Uni et plusieurs pays d’Europe, les outils Creative Green s’implantent au Canada et au Québec pour mieux guider les efforts de l’industrie de la culture. Pour faire face aux enjeux environnementaux de notre époque, une forte dose de créativité est nécessaire, les artistes joueront donc un rôle essentiel!
Pour en savoir plus sur les outils Creative Green, consultez le site Web du Conseil québécois des outils écoresponsables, dans la section Art vivant.