La neige a tardé… Je trace ces mots le 14 novembre, alors que notre bout du monde vient tout juste d’en accueillir enfin une couche. L’hiver, je parle de la saison comme de l’époque que nous vivons, est maintenant assurément présent.
Plus ça va et plus il m’est difficile d’écrire sur d’autres sujets que ceux qui sont les nôtres. Je ne parle pas de rénovations, de voyage ou d’une quelconque série télé, mais bien de ces faits qui occupent et préoccupent. Ce n’est pas mon genre de faire semblant, de dire que ça va lorsque ça ne va pas. Il n’est pas dans mes habitudes de changer de sujet lorsqu’il s’agit de nous, de nos vies, de l’avenir de nos enfants, de cette Terre qui nous porte et de cet hiver incertain dans lequel nous entrons. Il arrive aussi que je m’enflamme devant l’inertie, l’égoïsme et la bêtise. Puis, je me calme en marchant, en jardinant et en imaginant d’autres possibles. En espérant! Et quand vient la saison froide, je m’apaise… un peu.
Nos haleines sont trahies par l’air frais, des glaçons pendent aux toits et la neige révèle tous les passages : ceux des tempêtes, ceux des animaux et les nôtres, combien moins discrets! On a beau avoir calfeutré les portes, isolé les fenêtres, rentré le bois, allumé les thermostats pour s’y préparer doucement. On a beau faire des provisions à la tonne, mettre des épaisseurs de vêtements de plus pour sortir, ajouter des couvertures supplémentaires sur les lits jusqu’au prochain printemps. On a beau avoir fait tout ça et encore bien plus, rien encore ne peut empêcher sa venue.
Je ne sais pas pour vous, mais je n’ai jamais maudit cette saison qui sculpte nos vies, nos êtres depuis des milliers de lunes. Pour éviter qu’elle nous rentre dedans, je me laisse glisser, autant que faire se peut, dans sa nuit aurore boréalée. Fermer les yeux et entendre les flocons devenir poèmes.
Cela étant, l’arrivée tardive de l’hiver montre que nous avançons vers un grand bouleversement. Celui dont nous avons peur au point où nous refusons souvent d’en avouer la présence. Autant s’en détourner que de vivre toute cette anxiété. Il amènera d’abord avec lui, et cela pour d’éternelles saisons, des phénomènes météorologiques extrêmes dans un climat comme nos générations n’en ont jamais connu. On ne pourra en diminuer un peu les effets sans changer tout notre mode de vie énergivore et gaspilleur de ressources. C’est aussi simple que cela, je ne vois pas d’autre choix.
Ces feuillus dépouillés comme notre réalité dégarnie de son lot d’artifices inutiles. Ce froid qui ramène à l’essentiel besoin de chaleur. Cette lumière faite de tout ce que nous sommes, tout ce que nous pouvons être. Je ne sais pas quel sentier prendre, mais je sais que je ne veux ni ne le prendrai seul.
Si possible, avec cette saison si nôtre, faire page blanche et réécrire nos histoires. Commencer par juste s’imaginer autrement.


Auteur/trice