Non, ces jours-ci, pour plusieurs, ce n’est pas nécessairement le plus beau temps de l’année. Il fait froid, il y a la neige, il fait noir trop tôt. C’est beaucoup pour en faire une apothéose. Il y a Noël, le jour de l’An, les soupers de famille et d’amis qui se comptent sur les deux mains, les litres de boisson, les tonnes de cadeaux et les courses à droite et à gauche qui vont avec. Le temps des fêtes exige beaucoup de féérie. Il y a obligation de sourires et de bonheur, malgré tout.

L’organisation Center for a New american dream a questionné les Nord-Américains : 70 % des gens aimeraient que le temps des fêtes soit davantage axé sur le sens, les valeurs, que sur les cadeaux et les dépenses. On se sent donc submergés, piégés par la liste des choses à faire, de choses à donner, d’argent à flamber. La performance, encore !

Les Canadiens dépensent en moyenne près de 1 000 $ durant le temps des fêtes. Les Québécois, eux, société distincte, sont plus raisonnables (ou radins ?). Un sondage récent, effectué par Banque Scotia, montre que les Québécois dépensent 630 $, dont 475 $ pour les cadeaux. On paie vraiment trop d’impôt, ici ?

On passe pour un gratteux si on fabrique un cadeau à la main. On est weird si on offre du temps de qualité à quelqu’un qu’on aime. Ça ne s’achète pas sur Amazon. Moins glamour. Pierre-Yves McSween, comptable et chroniqueur économique, a écrit un livre au titre évocateur et direct : En as-tu besoin ? Il y parle entre autres de Noël :

Le Père Noël n’apporte plus les cadeaux mais Mastercard. Les gens ne sont pas toujours heureux à Noël, mais tous jouent le jeu. Ça recommence dès le 26, en faisant la queue pour en ajouter sur Mastercard.

L’orgie de dépenses, donc, mais qui laisse un goût amer en bouche, entre la dinde et la crème de menthe verte. On souhaiterait un Noël comme dans La petite maison dans la prairie, avec le feu dans l’âtre, la grande tablée et le père qui joue du violon. On accumule plutôt les listes et les factures. Tout le monde souhaite le retour des vraies valeurs, du partage, du temps en famille et de l’authenticité, mais en faisant la file aux caisses des magasins. Citation intéressante de Michel Bouthot, écrivain, professeur et psychologue : « Dès que l’adulte tue le mythe de l’existence du père Noël, il oublie le miracle du vrai partage qui existe dans le cœur de l’enfant. »

À qui la faute ? Les entreprises dépensent des milliards en publicité en fin d’année. On vend du bonheur. Il y a ces magazines aussi, comme le Coup de Pouce, le Ricardo, qui mettent la barre haute : souper parfait, décorations uniques, réveillons réglés au quart de tour. La performance, encore !

Noël autrement. Des idées existent. Offrez des cadeaux de seconde main, donnez les jouets qui débordent du coffre aux plus démunis, faites du bénévolat en décembre, organisez une fête plus simple et plus conviviale (des pot-luck !), invitez des voisins, qui partagent pourtant une bonne partie de notre quotidien…


Auteur/trice

Abitibien d’adoption, Valdorien depuis 20 ans, Dominic Ruel est enseignant en histoire et géographie au secondaire. Il contribue à L’Indice bohémien par ses chroniques depuis les tout débuts, en 2009. Il a été président du CA de 2015 à 2017. Il a milité en politique, fait un peu de radio, s’est impliqué sur le Conseil de son quartier et a siégé sur le CA du FRIMAT. Il aime la lecture et rêve d’écrire un roman ou un essai un jour. Il est surtout père de trois enfants.