Tout jeune, Christophe Préa se faufilait clandestinement parmi les musiciens adultes en ajoutant, au folklore des Îles Seychelles, le tintement d’une bouteille de Coca-Cola vide. Maintenant qu’il est venu fonder à Val-d’Or sa famille et le groupe SÉKWÉ, la musique demeure plus que jamais au cœur de son univers. Un univers qu’il veut partager, par tous les moyens…

 

 

Pousse ton pyrogue

La chanson Pousse ta pyrogue, exprime bien la démarche du musicien. « Pousse pyrogue et pars à la mer, d’où je viens, ça veut dire : fais quelque chose, passe à l’acte ! » La liste est aussi longue que diversifiée : cours de jimbe pour personnes atteintes du Parkinson, ateliers pour jeunes autistes, tournée des centres de la petite enfance, ateliers dans les écoles, cours de musique dans les communautés autochtones. L’idée est de propager le plaisir de la musique. « Fallait voir la dame de 80 ans, au milieu des autres parkinsoniens, danser avec le sourire jusqu’aux oreilles ! » C’est une approche participative, toute simple, humaine. Avec les enfants, il faut savoir créer une atmosphère de plaisir et, lorsque c’est atteint, en profiter pour enseigner des notions de musique à leur insu ! « Il y a beaucoup de jeunes talentueux au Lac Simon, là où j’enseigne. Il faut juste trouver le bon moyen de les accrocher. » Et ça fait toujours plaisir de savoir que les gens restent marqués par ces expériences. Certains continuent et apprennent le piano, la guitare, le jimbe…

Un pont
Si la musique rejoint les gens, elle sert aussi de pont entre les cultures. Karen Busque, conjointe et complice multi-instrumentiste de Christophe dans le groupe SEKWÉ, se souvient d’un spectacle dans la communauté de Kitcisakik : « On faisait une chanson en algonquin et tout le monde dans la salle riait pendant qu’on jouait ! On se demandait vraiment ce qui se passait… On fausse ? On prononce pas comme il faut ? “Ben non, c’est juste drôle de vous entendre chanter en algonquin ! Vous com-prenez même pas ce que vous dites !…” » C’est avec un immense plaisir que les musiciens retournent chaque année donner un concert dans la communauté. Musique du monde ? D’ailleurs, SÉKWÉ est plus vivant que jamais avec la parution au printemps dernier d’ Homo Habilis , premier album studio du groupe. Cynthia Castonguay complète le trio, au violon et au chant classique


À cela s’ajoutent de nombreux collaborateurs le temps d’un spectacle, d’une chanson ou d’un jam endiablé. « Sékwé » signifie entre autres « secouer » (danser en créole), et combine aussi Seychelles et Québec. « On ne s’arrête pas à l’étiquette de musique du monde qu’on nous donne. Notre musique, c’est la mise en commun de nos bagages respectifs, des influences qui nous ont marqués ». Et pour Christophe, c’est l’occasion de partager son héritage créole. C’est un folklore qui sait évoluer et se métisser, peut-être en réponse à la musique uniforme et commerciale qui se propage dans le monde. Étonnant à cet égard de constater les ressemblances entre les folklores seychellois et québécois, deux anciennes colonies françaises, avec l’héritage linguistique et catholique qu’on connaît.

« En outre, la musique est un choix de vie, qu’on a choisi de pratiquer comme une passion plutôt que comme une carrière. Tout simplement, on s’arrange pour se donner l’occasion de faire ce qu’on aime ». Et ils le font fort bien.

 

 

– L’album Homo habilis, de SÉKWÉ, est disponible chez Polysons et chez Jean Coutu à Val-d’Or, ainsi que chez Musique Migneault à Rouyn-Noranda.



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