Peu avant les Fêtes, le gouvernement du Québec a présenté ses offres aux enseignants. Legault ne s’est pas déguisé en père Noël : sans farce, la dinde du réveillon est passée de travers!

Je n’entre pas dans les détails de l’affaire, mais en gros, la proposition gouvernementale tient en peu de choses : augmentation du temps de travail, de la tâche et de la taille des groupes, et ce, sans augmentation de salaire, sauf le famélique 7 % sur 5 ans offerts à toute la fonction publique. C’est une gifle. Mais ce sont surtout des offres qui vont à l’encontre du bon sens, qui nient les besoins des profs et surtout, qui ne règleront rien au problème premier de l’éducation : la pénurie d’enseignants.

Les facultés d’éducation sont désertées, les listes de remplaçants se vident et de plus en plus de profs partent après quelques années d’expérience. En septembre dernier, lors de la rentrée, le ministre Roberge reconnaissait que la pénurie était importante et qu’elle allait durer quelques années. Il avait raison : les libéraux avaient laissé pourrir la situation pendant des années et c’est ainsi que la profession devenait moins attrayante. Avec son projet de maternelle 4 ans, ce pauvre M. Roberge a même dû permettre à des éducatrices d’enseigner. Il fait aussi la cour aux profs retraités pour combler les besoins en suppléance. Dans certains coins du Québec, il sera bientôt mal vu pour un prof de prendre une journée de congé pour se soigner.

Mais au-delà des questions de ressources humaines, d’organisation du personnel et d’administration, c’est la qualité de l’enseignement qui est en jeu. On ne s’improvise pas enseignant. Un manuel scolaire et deux ou trois exercices avec corrigés ne suffisent pas. Apprendre est complexe. Les recherches en éducation sont formelles et sans équivoque : la qualité de l’enseignement est le facteur premier qui influence la réussite des élèves. On aura beau avoir le plus bel éventail d’activités parascolaires, des corridors lumineux, deux heures de plus de sport par semaine, si l’enseignement laisse à désirer, on n’arrivera pas aux meilleurs résultats.

Les meilleurs systèmes d’éducation au monde recrutent parmi les meilleurs étudiants. Mais au Québec, la profession n’attire plus les gens : manque de valorisation, milieu de travail difficile, salaires peu compétitifs. Les facultés d’éducation des universités abaissent donc les critères d’admission. Parce qu’il faut bien pourvoir les postes vacants un jour ou l’autre!

Oui, la valorisation passe par de meilleurs salaires. La vocation? On n’utilise plus ce mot pour les autres travailleurs! Statistique Canada l’affirme : les profs québécois sont les moins bien payés au Canada. D’autres chiffres montrent que le retard des salaires dans le secteur public s’accentue. Dire merci aux profs à la télé, c’est gentil, c’est touchant. Mais il faudra leur donner aussi des salaires qui reconnaissent leur formation, leurs dix-sept années de scolarité et la responsabilité fondamentale qu’ils ont sur les épaules.


Auteur/trice

Abitibien d’adoption, Valdorien depuis 20 ans, Dominic Ruel est enseignant en histoire et géographie au secondaire. Il contribue à L’Indice bohémien par ses chroniques depuis les tout débuts, en 2009. Il a été président du CA de 2015 à 2017. Il a milité en politique, fait un peu de radio, s’est impliqué sur le Conseil de son quartier et a siégé sur le CA du FRIMAT. Il aime la lecture et rêve d’écrire un roman ou un essai un jour. Il est surtout père de trois enfants.