Tous les cinq ans, le ministère responsable des forêts établit un nouveau plan pour diriger les 600 machines qui sillonnent notre territoire jour et nuit vers des patches d’arbres à abattre. Le bureau de notre Forestier en chef les connaît toutes.

Actuellement, le buzz est de fournir au max les usines de madriers parce que la business est vraiment bonne. Les Américains en ont besoin, beaucoup de bungalows à reconstruire. Leurs ouragans sont une bénédiction pour nous. Le malheur des uns fait…

Mais comme nous vivons dans un pays démocratique et que la forêt est publique, le ministère doit soumettre son nouveau plan quinquennal à l’attention de la population. Celui-ci porte sur les années 2018-2023. Des petits encarts publiés dans les journaux régionaux nous invitent à le consulter. Sans plus.

On nous demande de déposer nos commentaires. Puis d’« avaliser » le plan. « Avaler » serait plus juste. Voici pourquoi. Le précédent plan (2013-2018) avait prévu une collaboration étroite entre le ministère responsable des forêts et celui de l’environnement afin d’atteindre, en 2020, la protection de 17 % de notre territoire. On est loin du compte, pas même 10 %. Ce même plan devait organiser pour de bon l’aménagement écosystémique de notre territoire. Ceci aurait peut-être permis d’éviter, entre autres, l’extinction du caribou des bois de Val-d’Or. Et les 600 machines roulent toujours, jour et nuit, quelles que soient les circonstances, semble-t-il.

Ce qui nous inquiète pour le moment : le « beau bois », y’en a plus. Le petit bois est de plus en plus au nord, de plus en plus loin. Ça coûte plus cher d’aller le chercher. Alors, le gouvernement a décidé de venir à la rescousse des compagnies. D’abord en ne les facturant pas pour les arbres aux diamètres plus petits que dix centimètres (c’est-à-dire 35 % de la récolte). Puis en accaparant les zones forestières les plus productives du sud – de préférence près des villes et des usines – pour intensifier, c’est-à-dire booster, le rendement des arbres. À nos frais, bien entendu.

Ce plan empiètera fatalement sur les projets d’aires protégées qui peinent tellement à se concrétiser. En fait, nous y voyons une tentative de les étouffer.

Alors qu’il a fallu parfois 15 ans de tractations pour qu’un petit bout d’aire protégée voie le jour, alors que des audiences publiques ont été tenues pour chacune des propositions émises en ce sens, là, d’un coup sec, le gouvernement veut geler 25 % du territoire pour faire de l’intensification, et ce, sans audiences publiques, sans même aucune discussion. Il décrètera.

L’Action boréale demande que ces territoires voués à l’intensification soient soumis aux mêmes règles ayant mené à la création d’aires protégées. Deux poids deux mesures? Non.