On a tous vu les capsules de Guy Nantel durant lesquelles il aborde les passants avec de simples questions d’histoire, de géographie ou d’actualité. Oui, il y a une sélection, un montage, mais on rit. On devrait plutôt s’inquiéter devant ces réponses, aussi peu nombreuses soient-elles. Il est triste, dans une société scolarisée pourtant, qu’on puisse croire encore que Champlain ne soit qu’un pont. Ou René Lévesque qu’un boulevard.
 
Il y avait un espoir dans les années ’90. On appelait cela « l’autoroute de l’information ». C’est Internet. Ce fut une illusion. On imaginait les gens en train de naviguer de musées en encyclopédies, de films d’époque en biographies pendant des heures.
Un bouillon de culture collectif qu’on se partagerait.
 
À quoi sert la culture générale, à part impressionner la parenté au Tricheur? Elle aide certainement à la formation du jugement et de l’esprit critique. Elle est aussi un antidote au « je-me-moi » contemporain. Ça décentre de soi-même. Ça libère de l’ici et maintenant. Les connaissances donnent une épaisseur à l’existence. La culture générale n’est pas uniquement une
simple accumulation de dates et de faits. Avoir écouté du Mozart remet Justin Bieber à sa juste place. Quelques films, des classiques, offrent une ampleur que les super-héros n’ont pas, malgré leurs pouvoirs.
 
Malheureusement, comme l’a déjà mentionné Jason Luckerhoff, professeur à l’Université du Québec à Trois-Rivières (UQTR) et consultant en communication : « ce n’est pas parce qu’on a plein d’informations sur Internet qu’on est éduqué à quoi en faire ».
 
Ces propos ont été rapporté par l’Hebdo journal, dans l’article «La culture générale, à quoi ça sert?». Et là, c’est pour beaucoup le rôle de l’école, du primaire à l’université. Il y a peut-être eu erreur avec cette idée de compétences. À six ou onze ans, les élèves doivent être en mesure d’apprécier des textes variés ou construire leur représentation du temps, de l’espace et de la société, par exemple. Avant même de posséder un large éventail de vocabulaire, de concepts ou de se situer
sur une carte et nommer les provinces canadiennes. On a peut-être mis la charrue avant les bœufs.
 
Connaissances d’abord, nombreuses et vastes, et ensuite, au secondaire, l’idée de compétences à développer.
 
« Les recherchent montrent que les compétences intellectuelles viennent après l’apprentissage de simples faits et non l’inverse. »
 
C’est de Karine Bach, spécialiste des grands concours scolaires français. L’université n’est pas en reste. La pression est de plus en plus forte pour qu’elle offre des formations de plus en plus pointues pour les besoins du marché du travail. Luckerhoff précisait encore que « nous avons cessé d’enseigner certains types de formations. Les étudiants sont plus spécialisés et les horizons sont moins larges».
 
Moins de culture, donc.
 
Les événements des dernières semaines et les nécessaires débats qui ont et auront lieu demandent de la rigueur et de la profondeur. Une culture générale riche.
 
À l’ère de la post-vérité et des alternative facts, il faudra les connaissances pour distinguer le vrai du faux, les faits de l’opinion, la raison de l’émotion.

Auteur/trice

Abitibien d’adoption, Valdorien depuis 20 ans, Dominic Ruel est enseignant en histoire et géographie au secondaire. Il contribue à L’Indice bohémien par ses chroniques depuis les tout débuts, en 2009. Il a été président du CA de 2015 à 2017. Il a milité en politique, fait un peu de radio, s’est impliqué sur le Conseil de son quartier et a siégé sur le CA du FRIMAT. Il aime la lecture et rêve d’écrire un roman ou un essai un jour. Il est surtout père de trois enfants.