Dans la chronique du mois d’octobre, je vous avais écrit que je reviendrais sur ce sujet. Les lignes qui suivent sont rédigées afin de changer nos habitudes de consommation et aider à garder ouvertes nos campagnes. Je tente de labourer doucement nos raisons…

Car si la culture se porte bien dans notre région, si la récolte des œuvres est généreuse et diversifiée, il n’en va pas de même pour l’agriculture. Les misères du monde agricole ne sont pas dues à une terre ingrate ni à un climat impossible, et surtout pas au fait que les gens ne travaillent pas assez sur les fermes, grandes ou petites. Le problème, pour moi, vient de la concentration de l’offre de produits par les chaînes d’alimentation, mais aussi du manque de soutien des gouvernements aux petits et très petits producteurs agricoles. Dans ce cas, comme dans tant d’autres, l’État est du bord des gros.

L’été dernier fut marqué de plusieurs manifestations d’agriculteurs à bout de souffle. On vient d’apprendre que le nombre de fermes en Abitibi-Témiscamingue est passé sous la barre des 700. Il y en avait 2200 au début des années 80. À ce rythme, il n’y en aura presque plus dans 10 ans. Se nourrir et occuper le territoire rime avec vivre ici. C’est pourquoi le 8 novembre, environ 4000 personnes participaient à la Marche verte pour notamment crier l’urgence de sauver l’agriculture au Témiscamingue.

Autrefois, il y avait un marché public à l’aréna de Rouyn-Noranda. On y vendait des légumes, des oeufs, etc. Des quartiers de viande pendaient aux crochets lorsque la température devenait fraîche. Aujourd’hui, les marchés publics revivent grâce à de nouveaux pionniers. Mais au même moment, les huissiers débarquent chez les descendants des familles qui ont défriché, labouré et semé un pays. On saisit leur vie, notre garde-manger et on fauche nos racines de colons… Que faut-il attendre de plus pour agir ?

Une foule de petits artisans n’attendent pas, ils font renaître une agriculture vivrière à échelle humaine. Car rien n’est plus normal que de manger ici ce qui est produit ici. Ce qui est anormal, c’est la réalité présente qui nous tue lentement en étouffant l’agriculture. Ce qui est anormal, c’est l’agrobusiness.

Pour que nous puissions manger des produits d’ici, frais et auxquels on peut davantage se fier : il est temps de semer. Semer ce mot d’ordre : « Achetons la nourriture d’ici  ! ». Allons la chercher dans les marchés publics, chez les producteurs et dans tous les endroits qui vendent nos produits. Demandons aux propriétaires de toutes les épiceries qu’ils offrent des aliments régionaux, que ce soit quelques kilos de rhubarbe ou des tonnes de boeuf à l’herbe. Passons le mot à toutes nos connaissances !

Je nous convie à soutenir ceux et celles qui nous alimentent à partir d’ici ! Je nous invite à nous soutenir collectivement ! Parce qu’un peuple ne vit pas vieux s’il n’est pas capable de se nourrir.

Joyeuses fêtes aux semeurs du pays !


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