Été 1997. Je viens de compléter une année au Cégep. Je suis jeune, heureuse et surtout, je reviens en région avec de nouvelles expériences derrière la cravate et un emploi d’été comme guide touristique en poche. Même si mon travail n’implique pas que je connaisse les autres attraits de la région, à la fin de leur visite les touristes me demandent inlassablement : « Qu’est ce qu’il y a d’autre à faire ici? » J’ai rapidement eu ma petite réponse toute préparée : je leur parle de ce que j’avais pu visiter auparavant, principalement lors de visites scolaires. Bref, je connaissais peu ma région


Heureusement, 1997, c’est aussi l’été où j’avais un ami propriétaire d’une vieille Chevette qui n’avait pas peur d’accumuler les kilomètres (c’était pré-ère des changements climatiques) et de partir à l’aventure sur les routes de l’Abitibi-Témiscamingue, chaque mercredi… mon unique jour de congé. Cet été-là, nous avons visité des plages du « Parc » La Verendrye, le Refuge Pageau, l’église de Pikogan, le Marais Antoine, le T.E. Draper, la grotte de Ville-Marie, le Centre fossilifère, l’école du Rang II, la cathédrale d’Amos, plusieurs sentiers du Parc Aiguebelle et j’en passe.

L’été 97 fût certainement celui où j’ai pris conscience des richesses dont regorgeait notre région, et du fait que celles-ci étaient bien plus nombreuses que ce que laissait présager mon cours de géographie de secondaire 3. Quel bel été de découvertes!

Prendre possession du territoire
La saison estivale a ceci de beau qu’elle nous offre de multiples opportunités de prendre possession du territoire que nous habitons, que ce soit pour faire découvrir la région à nos visiteurs ou simplement pour organiser les journées pluvieuses. Les vacances nous permettent enfin de vivre au rythme des gens d’ici. Et ce n’est pas le choix d’activités qui manque quand vient de temps de partir à l’aventure.

Occuper le territoire, c’est aussi ça! C’est le connaître dans ses moindres détails, l’apprivoiser et se l’approprier. C’est participer au développement du tourisme local en l’encourageant. Malheureusement, trop souvent, notre esprit d’aventure et notre désir d’exploration nous amènent à découvrir des contrées lointaines (régions ou pays voisins) au détriment de se qui se trame chez nous. Pourtant, il y a tant à voir et à faire ici!

Le tourisme culturel
Le tourisme étant un moteur économique important dans la région, il est intéressant de constater toutes les initiatives qui ont été mises en place, dans ce domaine, ces dernières années. En diversifiant l’offre, les villes et MRC se positionnent de plus en plus en matière de tourisme culturel. Il n’y a qu’à penser aux nombreux festivals qui ont vu le jour au cours des dix dernières années, et plus récemment aux circuits patrimoniaux qui poussent ici et là (à La Sarre il y a deux mois puis à Val-d’Or le mois dernier). La région, prenant acte du vieillissement de la population, se préoccupe de plus en plus de son patrimoine bâti et de mettre en valeur ses trésors du passé. Il n’y a qu’à penser au Guide de découvertes patrimoniales et touristiques rédigé il y a quelques années par le Conseil de la culture, un bel outil pour quiconque rêve d’en connaître plus sur la région et du même coup la découvrir.

Si l’Abitibi a l’excuse d’être encore jeune, le Témiscamingue a pour sa part déjà fait les efforts nécessaires afin de mettre en valeur son histoire, si on en juge par le fait que ce territoire comptant un peu plus de 10% de la population régionale abrite le quart des membres du Réseau muséal de l’Abitibi-Témiscamingue.

Des galeries d’arts à hauteur d’homme
Si la région se défend bien en matière de tourisme patrimonial, il en est tout autrement en ce qui a trait aux ateliers, galeries et visites chez l’artisan. Ces petits lieux de créations et de diffusions qui font le charme d’une région sont trop peu nombreux chez nous, sauf peut-être dans la MRC d’Abitibi-Ouest. En comparaison, une région pas plus peuplée, pas plus grande et pas plus près des grands centres que la nôtre, la Gaspésie, peut s’enorgueillir d’offrir une quarantaine d’arrêts dans son Circuit des arts visuels et des métiers d’arts, et ici on ne parle pas des Centres d’expositions ou autre institutions du genre. Serait-ce vraiment plus difficile pour nous d’en faire autant?

Comment se fait-il que nos artistes n’ont pas autant cette fibre entrepreneuriale qui leur donnerait le goût d’avoir pignon sur rue? Est-ce parce que nos institutions ne les soutiennent pas assez? Parce que le tourisme culturel est un concept nouveau en région et qu’il n’y a pas encore de demande en ce sens de la part des citoyens et des touristes? Ou tout simplement parce que nos artistes sont trop occupés à créer? Toutes ces réponses se valent et expliquent bien ce relatif sous-développement, d’autant plus si on les additionne. 

 

La région n’a pas cette tradition d’artistes qui viennent y résider pendant l’été et qui profitent de ce flot touristique, le tourisme étant un phénomène relativement récent en Abitibi-Témiscamingue, et le tourisme culturel structuré et organisé en étant à ses premiers pas.

Bien sûr, on peut depuis longtemps faire du tourisme culturel chez nous, mais on tarde à organiser les forces du milieu pour nous créer un réel pouvoir d’attraction. Il est temps d’y penser en tant que collectivité, et que les artistes s’associent entre eux afin de créer un concept à leur image, quelque chose d’original qui leur permettrait de se doter d’une vitrine afin d’exposer leurs œuvres et du même coup se donner une chance de les vendre. Il est aussi temps que les organismes, promoteurs et instances politiques appuient les démarches qui vont en ce sens. C’est en développant ce genre d’initiatives que nous inciterons plus d’artistes à venir travailler, exposer et vivre en région… Et c’est sans compter les touristes qui les suivront.


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