C’est dans la perspective d’un retour à une certaine normalité que s’est tenue, du 12 au 15 octobre, la 10e Biennale d’art performatif de l’Écart. Annulée en 2020 (on se demande bien pourquoi!), cette 10e édition s’est déroulée dans la fébrilité et l’excitation qu’entraîne l’idée de se retrouver tous ensemble autour des propositions performatives.

La Biennale s’est articulée sur quatre jours. La soirée d’ouverture du mercredi soir marquait le retour de Geneviève et Matthieu à L’Écart. Exposés depuis près d’un mois, les éléments matériels de la performance M. Gros ont pris vie devant une assistance considérable. Mentionnons que cette performance s’est promenée à Toronto, Ottawa et Montréal.

Le samedi après-midi, la performance du Edmund Porn Project (Marie-Hélène Massy Emond et Danny West), sur l’arrivée d’une nouvelle mine à ciel ouvert dans le village, a permis de voir les résultats des travaux préparatoires du duo effectués en collaboration avec les habitants de Cléricy. Un transport avait été prévu entre la galerie et le lieu de la performance. Alliant l’occupation du territoire et la participation citoyenne sonore, Prélude 101.1.1 se veut une « œuvre sonore anticipatrice et ramanchée ».

Outre les performeurs de la région, des artistes de tous horizons nationaux et de toutes disciplines ont participé à cette mouture : Américains, Polonais, Français, Torontois et Québécois issus des domaines des arts visuels, de la danse contemporaine, du théâtre et de la musique expérimentale. Il convient de mentionner que cette programmation était la première qu’Audrée Juteau avait concoctée pour nous. Directrice artistique depuis près de deux ans, elle a dû composer avec les problèmes liés à la pandémie : activités reportées ou annulées, déplacements limités… Elle a pu enfin donner son plein potentiel et présenter le fruit de son travail de direction artistique.

L’Écart a poursuivi cette année des collaborations de longue date, en particulier le Musée d’art de Rouyn-Noranda (MA) et L’Usine C de Montréal, en plus d’ajouter d’autres partenaires : le FADO Performance Art Centre de Toronto, le Studio 303 de Montréal, le Théâtre du Trillium d’Ottawa et le festival Actoral de Marseille, qui se consacre aux nouvelles écritures contemporaines.

Il faut admettre qu’une performance incarne, intrinsèquement, le contraire absolu de l’idée de confinement et d’isolement. Une performance s’apprécie dans le moment présent et communautairement. Filmée, elle n’est plus performance. C’est un moyen d’expression particulier dans la mesure où il s’inscrit dans un temps distinctif et délimité. Une peinture peut être appréciée après le vernissage de l’exposition, mais pas une performance. Il faut y être au moment où l’artiste la crée. Cette forme d’art demande de la disponibilité à un moment donné et dans un lieu précis. Non seulement la présence est requise, mais elle peut, à tout moment, selon les intentions de l’artiste, influer sur l’œuvre. La performance, encore plus que le théâtre ou la danse, exige une communion entre le public et l’artiste, chacun nourrissant l’autre. De tous les arts vivants, cette dernière est la plus fragile, la plus personnelle et la plus ancrée dans la réalité. L’ici et le maintenant se déploient dans toute leur splendeur.


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