DOMINIC RUEL 

Au Québec, la lutte aux changements climatiques est incarnée par la batterie et l’électrification des transports. Il faut réduire la dépendance au pétrole, la combustion de l’essence et l’émission de gaz à effet de serre. C’est la grande idée, portée longtemps par Pierre Fitzgibbon, avant qu’il ne retombe en amour, à un très bon moment. Le gouvernement a même cogné sur la table et décidé d’une date-butoir : en 2035, il sera interdit de vendre des véhicules à essence. La voiture électrique doit devenir la norme! Après tout, pourquoi pas? On a Hydro-Québec, du courant en masse, du lithium, si on ose l’extraire. On fera venir des usines de batteries. On leur donnera de l’argent. C’était le plan, le plan écologique, qui ressemble aussi beaucoup à un plan idéologique et politique et à une marche forcée. Un « Crois ou meurs! » 

Avec la batterie verte, tout n’est toutefois pas rose. Certes, une voiture électrique n’émet pas de CO2. Sa batterie, toutefois, a un impact environnemental qui reste important : mines de lithium (l’extraction d’une tonne de minerai demande un million de litres d’eau), extraction de cobalt par des enfants (40 000 au Congo!), accumulation de déchets qu’on devra aussi recycler. On augmentera aussi notre dépendance aux minéraux rares et il faudra de l’électricité qui, partout dans le monde, est souvent produite grâce au charbon et au gaz. Sans parler du fait qu’il faudra considérer l’autonomie de la batterie et développer des infrastructures de recharge. 

Des entreprises ont voulu installer des usines ici. Volkswagen a accepté notre argent pour choisir le Québec. La pièce maîtresse, c’était toutefois Northvolt et son projet de fabrication de batteries de sept milliards de dollars. Le terrain a été acheté à Saint-Basile, le gouvernement a encore investi un milliard, la machinerie a commencé le travail et, rapidement, il y a eu de l’eau dans le gaz. Pierre Fitzgibbon, dont ce projet est le bébé, a annoncé des retards de 12 à 18 mois dans la construction de l’usine. En septembre 2024, dans le Journal de Montréal, l’économiste Christian Sandström affirmait que le projet Northvolt ne verrait jamais le jour puisque la situation financière de la compagnie implosait. Cette dernière était déjà aux prises avec des problèmes financiers en Suède. Pis, en novembre 2024, l’entreprise a demandé la protection contre les créanciers aux États-Unis.  

Courtoisie Dominic Ruel

Il convient de rappeler aussi un autre dossier, celui de Lion Électrique, de Saint-Jérôme, constructeur de camions et d’autobus électriques, qui a coûté de l’argent aux contribuables québécois et qui connaît aussi des difficultés financières et opérationnelles. On pourrait ajouter au portrait une diminution des capacités de la province de fournir l’électricité en raison de la construction rapide de nouveaux bâtiments, de la volonté des entreprises de réduire leur empreinte carbone, de l’adoption accrue des véhicules électriques – tiens donc! – et des événements climatiques qui ont affecté la production, alors que la construction de nouvelles centrales et de parc éoliens est loin de faire l’unanimité. 

La marche vers 2035, la batterie et le véhicule électrique est un saut dans le vide, un saut cher en argent pour l’ensemble de la population québécoise. Le gouvernement a dépensé des sommes folles et les voitures électriques resteront coûteuses pour les individus et les ménages, leur valeur venant uniquement de la batterie qui demande des ressources qui sont limitées en quantité. Il y aurait des méthodes plus rapides, entre autres l’utilisation du gaz naturel, qui réduit le CO2 déjà de 20 % et l’émission de particules fines de 90 %.  

C’est un choix manichéen, au fond, un « tout ou rien », qui ne laisse pas place à l’imagination technologique et à aux démarches industrielles. 


Auteur/trice

Abitibien d’adoption, Valdorien depuis 20 ans, Dominic Ruel est enseignant en histoire et géographie au secondaire. Il contribue à L’Indice bohémien par ses chroniques depuis les tout débuts, en 2009. Il a été président du CA de 2015 à 2017. Il a milité en politique, fait un peu de radio, s’est impliqué sur le Conseil de son quartier et a siégé sur le CA du FRIMAT. Il aime la lecture et rêve d’écrire un roman ou un essai un jour. Il est surtout père de trois enfants.