DOMINIQUE ROY
Et si le soleil ne se levait pas? Voilà le titre de l’exposition de Benjamin Perron, présentée au Rift jusqu’au 15 mars. Bien que le Témiscamien ait quitté la région depuis bon nombre d’années, tout porte à croire que l’ancrage de l’artiste sur son territoire d’origine y est toujours bien solide puisqu’une cinquantaine de personnes – famille, amis et membres de la colonie artistique –, ont assisté à son vernissage, le 24 janvier dernier, pour (re) découvrir le travail accompli au cours des dernières années alors qu’il terminait d’abord son baccalauréat en beaux-arts au Studio Art de l’Université Concordia, puis une maîtrise en beaux-arts à la School of Art de l’Université du Manitoba.

Également titulaire d’un baccalauréat et d’une maîtrise en sociologie de l’Université Laval, Benjamin Perron aborde la photographie sous un angle différent, remettant en question le rythme effréné et l’accélération de la société actuelle ainsi que la multiplication et l’accumulation en quantité industrielle des images numériques. C’est par un retour aux sources, marqué par une volonté de ralentir, qu’il a recours aux techniques traditionnelles de la photographie argentique, un procédé qui lui permet de créer, sans lentille et sans caméra, tout simplement à partir de papier photosensible. Exposées à la lumière du jour, ses œuvres sont donc non développées et non fixées en chambre noire.

UNE DÉMARCHE ARTISTIQUE LENTE ET MINUTIEUSE
L’artiste souligne la beauté de ce processus, où chaque photo est le résultat d’une interaction unique entre la lumière et la matière, une façon aussi de capturer le temps et de se connecter à son environnement. Pour ce faire, l’artiste récupère du papier photosensible périmé, conçu pour réagir à la lumière. Sur ces feuilles, il dépose des mauvaises herbes, histoire de leur donner une certaine notoriété. Le tout est par la suite exposé aux éléments naturels, comme le soleil et la pluie. Ainsi, les sels d’argent, qui recouvrent le papier photosensible, subissent une réaction chimique. Ce procédé crée des images uniques, témoignant du passage du temps et des conditions météorologiques, reflétant ainsi une profonde connexion avec la nature et le territoire tout en offrant une perspective poétique sur le monde qui nous entoure. C’est ici que l’expression « laisser le temps faire son œuvre » prend tout son sens.

Benjamin Perron a aussi développé un intérêt pour les caméras artisanales, construites à partir de matériaux simples, comme des cannettes d’aluminium, qui lui permettent de redécouvrir la magie de la photographie. La confection de ces appareils rudimentaires, le choix de leurs lieux d’implantation ainsi que la durée de leur exposition font partie des étapes qui sondent, encore une fois, le rapport de l’artiste avec le temps et les lieux.
Derrière sa lentille, le photographe traditionnel contrôle les angles, le mouvement, les détails, l’émotion, la composition, la perspective, etc. Tous des éléments sur lesquels Benjamin Perron n’a aucune emprise. La narration visuelle de ses œuvres n’appartient qu’au temps et à l’environnement, une solution de rechange à la rapidité et à l’instantanéité sans pour autant altérer la beauté et l’esthétique de la technique photographique. Une exposition à voir et à revoir!
Pour découvrir les œuvres, le parcours et la démarche artistique de Benjamin Perron, consultez son site Web et suivez-le sur Instagram et Facebook.
