LISE MILLETTE

Née à Amos, Sandra Veillette n’a jamais tout à fait quitté les sentiers de randonnée de son enfance ni les bords de plage et de rivières où, petite, elle récoltait des pierres de fée.

« Je suis une artiste-cueilleuse, dit-elle simplement pour justifier ses arrêts fréquents et les trouvailles qu’elle apporte au gré de ses déplacements. J’ai besoin de voir la matière, de la trouver et d’en être inspirée », poursuit-elle, ajoutant que souvent, c’est une jambe, ou du moins ce qui en prend la forme, qui attire son regard.

Les œuvres de Sandra Veillette ont pour trame commune le mouvement. Tantôt des ballerines, des funambules, des acrobates, ou encore une forme humanoïde qui tend ses bras ou qui danse avec une jupe en dentelle qui est en fait un pli d’un nid de guêpes.

Photographe : Sandra Veillette

« Depuis que je suis toute petite, je ramasse des objets dans la nature. Toute jeune, je ne savais sans doute pas admirer, mais j’observais. Tout ça se transpose dans ce que je fais aujourd’hui dans ma pratique artistique. Ce que j’ai observé, je le reproduis », analyse-t-elle. Au fil de ses cueillettes, Sandra Veillette a pu accumuler une réserve éparse. Des papillons, des poils de porc-épic, des feuilles de nid de guêpes qui deviennent souvent des vêtements dans ses œuvres.

« Je pars souvent de la jambe, lorsque je crée, je commence souvent par là. Mais je ne peux pas prendre un morceau et en faire tout de suite quelque chose. Il doit d’abord sécher, alors j’ai des bacs. Je suis très ordonnée. J’ai des bras petits, moyens, des bouts de bois ou de branches pour des jambes, des cocottes pour faire des mains et des échinops pour des têtes, ou encore des galles de verge d’or. »

L’échinops, aussi appelé « boule azurée », fait partie de la famille des chardons. C’est avec cette petite boule touffue qu’elle confectionne la plupart des têtes de ses personnages.

Photographe : Sandra Veillette

DU MAQUILLAGE À L’ASSEMBLAGE

Sandra Veillette a travaillé pendant des années comme maquilleuse à TVA, comme sa mère d’ailleurs. Elle précise qu’elle n’a pas véritablement suivi ses traces, mais ses études en cinéma l’ont menée tranquillement vers la télévision. Cette vie professionnelle a été le prélude d’une nouvelle vie artistique qu’elle ne soupçonnait pas encore, bien que la création ait toujours été présente.

« Plateaux d’Ad Lib, émissions diverses, tournées : j’ai rencontré tellement de gens, j’ai maquillé tous les grands et tout ça m’habite. J’ai aussi suivi des cours d’effets spéciaux. C’est ce bagage que j’ai apporté avec moi », raconte Sandra Veillette.

L’artiste précise que l’art visuel a toujours fait partie de sa vie et elle dresse plusieurs parallèles entre son métier et sa création. Comme si, à force d’observer, elle avait emmagasiné un tas d’images qui ne demandent qu’à prendre forme. C’est vrai pour les personnages comme pour les mouvements qu’elle représente.

Dans sa pratique professionnelle, elle a maquillé des artistes du Cirque du Soleil et des ballerines. On comprend ainsi mieux d’où lui viennent ces êtres tout en finesse, perchés ou dansant en équilibre. Ironiquement, toutefois, aucune de ses pièces n’a de visage. « J’ai maquillé tellement de gens, je pense que j’en ai eu assez des visages! » lance-t-elle en riant.

SE FAIRE CONNAÎTRE ET SE LAISSER DÉCOUVRIR

« En arts, plusieurs pensent qu’ils vont se faire découvrir. Ce n’est jamais ça. C’est du travail », appuie Sandra Veillette.

Après avoir travaillé ses œuvres, présenté quelques pièces à des collègues, elle se décide à monter un dossier et à l’expédier auprès de différentes galeries. Ses bouteilles lancées à la mer ont trouvé différents lieux pour s’ancrer, jusqu’en France, à la galerie Orenda qui lui a permis de présenter ses œuvres.

Aujourd’hui, Sandra Veillette expose dans cinq salles au Québec : à Montréal, Québec, Saguenay, Saint-Jean-Port-Joli et Magog. « J’aimerais beaucoup pouvoir un jour être exposée chez-moi, dans mon chez-moi d’origine. C’est un rêve d’être exposée en Abitibi-Témiscamingue », confie-t-elle.


Auteur/trice

Lise Millette est journaliste depuis 1998, tant à l'écrit qu'à la radio. Elle a également été présidente de la Fédération professionnelle des journalistes du Québec (FPJQ). En Abitibi-Témiscamingue, elle a été rédactrice en chef de L'Indice bohémien en 2017 et depuis, elle continue de collaborer avec le journal.