Plusieurs communautés originaires d’Europe de l’Est ont participé à la naissance et au développement de Rouyn-Noranda, qui célébrera son centième anniversaire en 2026. 

Parmi ces collectivités, on compte la communauté juive qui a largement contribué à toute cette épopée. Son histoire apparaît comme une véritable saga dans un ouvrage collectif paru en 2023, The Jewish Community of Rouyn-Noranda: The life and history of a small Jewish community in Northern Quebec (remembered by those who lived there) [Traduction libre : La communauté juive de Rouyn-Noranda : la vie et l’histoire d’une petite communauté juive dans le nord du Québec (racontée par ceux qui y ont vécu)]. 

À son apogée dans les années 1940, la communauté juive comptait 45 familles et formait un groupe uni et solidaire. 

Cette communauté s’est établie en deux vagues. La première s’est produite à la suite de la Première Guerre mondiale dans les années 1920; la seconde a été marquée par l’arrivée de personnes ayant survécu à la Deuxième Guerre mondiale qui étaient en quête d’un refuge dans les années 1940. Cherchant à fuir les persécutions dont ils étaient victimes, des communautés juives d’Europe de l’Est ont d’abord fixé leur regard sur les États-Unis. En 1924, toutefois, le Congrès américain a adopté une loi les empêchant d’émigrer dans ce pays. C’est alors qu’elles se sont tournées vers le Canada, un pays plus accueillant, jusqu’à ce que le gouvernement libéral de Mackenzie King adopte une politique réduisant l’immigration juive presque à zéro. 

Avant que cela ne se produise, des hommes d’affaires juifs ont été attirés vers Rouyn et Noranda par le développement des mines. Les Kaplan et les Scott sont arrivés dès 1924. En 1927, on comptait déjà une douzaine de familles juives. Noranda exerçait une attraction supérieure et plusieurs ont adopté la langue anglaise. En 1950, il y avait 18 familles juives à Noranda et 15 à Rouyn. 

Crédit : Courtoisie

Les membres de la communauté s’impliquaient dans plusieurs champs d’activités commerciales et professionnelles : le commerce du vêtement, la couture, les tailleurs, la bijouterie et la vente de meubles. Également, la distribution de viande, d’épicerie, de bière et de lait est autant de domaines où ces communautés se sont distinguées. 

Ville de cinéma, Rouyn-Noranda doit beaucoup à la famille Korman qui a ouvert des salles de visionnement qui représentaient un des principaux loisirs de la population. En ce qui concerne les professions, les membres de ces communautés pratiquaient également la médecine, la pharmacie, la dentisterie et le droit. Dans ce dernier domaine, il est intéressant de souligner la contribution de maître Max Garmaise, qui est devenu juge à la cour juvénile et qui a participé à la création du centre d’accueil pour jeunes La Maison Rouyn-Noranda. Maîtrisant parfaitement la langue française, le juge Garmaise a été un important trait d’union avec la communauté francophone. 

De nombreuses autres familles ont fait leur marque dans la région et ont contribué à son essor. On peut citer les Medvnick, les Ironstone, les Miller, les Sandberg et les Martin, dont les nombreuses réalisations ont laissé des traces. 

On constate que les membres de la communauté juive arrivaient avec un important bagage et des compétences diversifiées, ainsi qu’une formation souvent supérieure à la moyenne. Cela tient aux caractéristiques connues de la communauté juive et à sa forte cohésion. À ce chapitre, il est important de souligner l’importance de la pratique religieuse qui unissait les familles et les générations. Le rôle du rabin Katz, arrivé au début des années 1930, mérite d’être souligné. Il s’agit d’un personnage important dont l’enseignement a marqué des générations. La synagogue inaugurée en 1949, qu’on peut toujours voir sur la 9e Rue, témoigne de l’importance de la communauté juive de l’époque. 

À partir des années 1950, on assiste à son déclin, comme à celui d’autres communautés arrivées d’Europe de l’Est. Dès la fin de leurs études secondaires, les jeunes se dirigeaient vers Montréal et Toronto pour suivre leur formation. Par la suite, le retour en région n’était pas chose courante, comme ç’a été aussi le cas pour la jeunesse québécoise francophone. 

Comme la plupart des jeunes avaient adopté la langue anglaise, leur retour était encore plus incertain. Les jeunes ne revenant pas, les parents ont suivi le pas. Le phénomène a été accentué par l’incapacité de maintenir les pratiques religieuses. La synagogue a été vendue en 1979 et transformée en maison d’appartements. En 1989, il ne restait que deux familles juives à Rouyn-Noranda. 

On doit cet ouvrage à Sol Mednick et Rosalie (Mednick) Nepom et à de nombreux collaborateurs, dont Esther (Korman) Verred, le Dr Isaak Katz et Bill Gladstone. On y retrouve les souvenirs de ce qui a été un élément important des forces qui ont contribué à faire de la Ville de Rouyn-Noranda ce qu’elle est aujourd’hui. 


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