Après 41 ans, le Festival du cinéma international en Abitibi-Témiscamingue (FCIAT) comble toujours les cinéphiles, qui ont été nombreux à se déplacer à Rouyn-Noranda pour profiter de la riche programmation offerte par l’événement. Le cinéma témiscabitibien était à l’honneur grâce à plusieurs productions qui ont permis au public de découvrir, ou de redécouvrir, les talents d’ici.
HIVER GLACIAL, FILM À ÉCHELLE HUMAINE
Dans le moyen métrage documentaire Au lieu de prendre mon char, le réalisateur Jean-François Perron suit le chroniqueur et aventurier Guillaume Rivest dans un périple hors du commun : partir de Rouyn-Noranda en ski nordique pour aller livrer sa chronique en direct dans la tour montréalaise de Radio-Canada, 680 kilomètres plus loin. Exploit physique, camping hivernal, température incertaine et paysages à couper le souffle : la recette est gagnante pour tenir le public en haleine. Le documentaire emprunte aux codes du cinéma direct pour créer un film à l’échelle humaine, ce qui permet au public de vivre l’expérience de près. Guillaume Rivest a d’ailleurs filmé lui-même plusieurs scènes se déroulant en territoire isolé. « Filmer, dans ce contexte-là, c’est difficile. Quand t’as fait 30 kilomètres dans ta journée, la première chose qui te tente, ce n’est pas de te filmer la face. Mais en général, les moments qui valent le plus la peine, c’est ceux où ça te tente le moins de filmer », raconte-t-il.
À la sortie des projections, l’équipe était ravie. « On est vraiment contents, vraiment choyés. On s’attendait à de l’amour mais pas tant que ça », se réjouit le réalisateur. Au lieu de prendre mon char est un premier pas dans le domaine du cinéma documentaire pour les Productions 3 Tiers, qui comptent bien tirer profit de cette expérience pour développer d’autres projets.
CAPITALISATION VERSUS AUTONOMIE : LE RAPPORT AUX RESSOURCES INTERROGÉ
Dans un contexte où nous sommes dépendants des chaînes d’approvisionnement internationales et où nos ressources naturelles sont capitalisées par des multinationales étrangères, comment peut-on s’assurer que les besoins de base de nos populations soient comblés à court, moyen et à long terme? Dominic Leclerc et ses collaborateurs se penchent sur cette épineuse question dans le documentaire Pour nous chez nous. « On a attaqué les ressources avec le filon de la financiarisation. Au départ, c’était en lien avec le dossier de l’accaparement des terres agricoles. Et là, on a vu le côté financier de prendre une ressource », explique le réalisateur. En jetant un regard sur différentes industries (l’eau, les pêches, l’agriculture, la foresterie et les mines), il dresse un portrait québécois de la gestion des ressources naturelles et de ses conséquences sur notre autonomie locale. Produit par les Productions Lustitia, Pour nous chez nous est disponible pour le visionnement sur le site Web de Télé-Québec.
TRAQUE, ERRANCE ET IMAGINAIRE URBAIN
Trois autres films tournés dans la région ont retenu l’attention lors du festival. Le court métrage Ravages, une réalisation de Maxime Dupuis produite par le collectif valdorien les Productions d’la 3e Avenue, aborde la relation complexe entre un père et de sa fille (Bruno Crépault et Stéphanie Harnois), en expédition de chasse pour une première fois ensemble. Dans le film poétique Rouyn-Noranda, l’artiste multidisciplinaire Jil Guyon nous transporte au cœur de la désolation dans un univers où l’intériorité du personnage se fond avec les paysages industriels, magnifiés à travers la lentille de Béatriz Mediavilla. Quant au court métrage expérimental Brasser la cage, réalisé par Colin Malgogne et produit par le Petit Théâtre du Vieux Noranda, c’est une interprétation libre basée sur résidence d’artiste en danse in situ où quatre chorégraphes et un designer sonore se sont approprié l’imaginaire citoyen du parc Mouska.
Les cinéphiles ont également pu profiter du talent de la relève régionale grâce à un bloc consacré aux films étudiants. Le court métrage documentaire Toxique d’Anahée Brousseau (Cégep de l’Abitibi-Témiscamingue) et le film d’animation A Lost Child de Max Spiegel (Université du Québec en Abitibi-Témiscamingue) ont reçu le Prix Relève Desjardins.


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