Dans sa cour arrière, qui est également son lieu de travail, son garde-manger et celui des nombreux clients qui profitent des légumes de la ferme urbaine Écobourgeons, Vincent Fluet me tient un discours de plus d’une heure sur l’importance de l’agriculture locale, à petite échelle et respectueuse de l’environnement. L’entreprise maraîchère de moins d’un hectare, dont on a pu goûter les produits pour la première fois cette année, est un modèle plutôt unique pour la région et s’inscrit comme une affirmation qu’il faut repenser nos façons de faire l’agriculture. 

Titulaire d’un baccalauréat en étude des conflits et droits humains et d’un autre en agroéconomie, Vincent a cumulé différents emplois dans le domaine agroalimentaire avant de lancer Écobourgeons. Son expérience lui a permis de voir les différentes facettes de ce domaine qui tend à préoccuper de plus en plus les consommateurs. La première motivation dont Vincent me fait part en parlant de son projet est ses enfants. Comment s’assurer que les générations futures auront accès à la sécurité alimentaire dont nous avons bénéficié? Cette question agit comme un point d’ancrage dans son argumentaire pour la promotion de l’agriculture locale.

Vincent me parle ensuite du grand nombre d’intermédiaires dans les chaînes de distribution ainsi que des distances importantes que nos aliments parcourent pour arriver à notre assiette. Dans une ère marquée par les changements climatiques et les bouleversements mondiaux, il semble clair pour lui que nos modèles actuels d’agriculture et de distribution sont bien plus fragiles que ce que peut offrir l’agriculture de proximité. 

En discutant de l’impact de l’agriculture sur l’environnement, le terme biomimétisme revient comme un leitmotiv dans la bouche de Vincent : « Des monocultures avec des centaines d’acres ça n’existe tout simplement pas à l’état naturel ». Vincent est bien conscient que le modèle d’Écobourgeons ne permet pas de faire des économies d’échelle, mais il souligne qui si chaque communauté était desservie par des agriculteurs locaux, les coûts liés à la distribution pourraient être diminués. Cela permettait également d’augmenter l’indépendance alimentaire, la résilience et de développer les connaissances en agriculture au sein de chaque milieu. Par ailleurs, il accueille avec enthousiasme l’aide donnée aux nouveaux modèles d’agriculture, comme l’annonce du gouvernement d’offrir un tarif préférentiel d’électricité aux serriculteurs (producteurs qui pratiquent l’agriculture de serre) puisqu’il s’agit d’un projet chez Écobourgeons. Selon Vincent, il s’agit d’un véritable défi : « Dans la littérature, l’agriculture nordique, ça se passe dans le nord des États-Unis; moi je rêve de faire pousser des légumes à l’année au nord du 48e parallèle. »

À sa première année, Vincent a réussi à cultiver 22 planches (surfaces de culture de 76 cm x 18 m) et à produire plus d’une vingtaine de variétés de légumes, et ce, sans pesticide et avec un usage minimal de machinerie. Les consommateurs sont au rendez-vous et tous les paniers de légumes d’Écobourgeons ont trouvé preneur. Vincent est persuadé que l’agriculture de proximité est plus qu’une mode passagère, mais bien une façon de pérenniser l’agriculture.


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