Organisation structurante et acteur majeur du développement culturel en Abitibi-Témiscamingue, le Conseil de la culture de l’Abitibi-Témiscamingue (CCAT) a observé bien des changements dans la vie culturelle de la région, notamment depuis la naissance d’un journal culturel régional. Pour se remémorer les moments marquants de cette décennie, L’Indice bohémien s’est entretenu avec la directrice du CCAT, Madeleine Perron.

Ces dix dernières années ont assurément été mouvementées pour les artistes et organisations œuvrant dans le milieu culturel. De nouvelles réalités sont apparues et le CCAT, notamment, a dû s’adapter rapidement à ces changements, dont l’avènement de l’ère numérique. « Le numérique a eu un impact sur le modèle d’affaire de tous les secteurs d’activité – sur le plan de la production, de la commercialisation, de la création. Ça s’est extrêmement transformé », remarque Mme Perron. La rapidité avec laquelle évolue ce secteur oblige par ailleurs les institutions à tendre l’oreille aux tendances, aux réalités changeantes. « On a toujours été extrêmement préoccupés pour que ce soit structurant pour le milieu culturel. Au Conseil de la culture, en 2012, on avait déjà fait un colloque sur le numérique. On commençait aussi à faire des liens avec l’UQAT et la formation en création numérique. On a toujours essayé d’être à l’affût et de développer des compétences du milieu culturel de l’Abitibi-Témiscamingue », ajoute Madeleine Perron.

À l’échelle nationale, le milieu culturel a également connu de nombreuses fluctuations sur le plan du financement. « Particulièrement en 2014-2015, se souvient Mme Perron. Plusieurs structures organisationnelles ont disparu. Ça a eu un grand impact. On a vécu quelques années où il y avait moins de possibilités de financement. »

Pourtant, de nombreuses initiatives ont vu le jour pendant ces années, qu’on pense aux festivals ou aux nouveaux lieux de diffusion. « À cette époque, un autre grand chantier important [est apparu], c’est CULTURAT, ajoute Madeleine Perron. Le Conseil de la culture organisait vers 2009 un colloque sur le tourisme culturel, et c’est de là qu’est née cette initiative. » Si l’impact de CULTURAT s’est peu fait sentir sur le plan touristique, il a cependant été plus grand auprès des milieux municipal et entrepreneurial. « Le milieu culturel a réussi à développer des collaborations avec ces milieux-là qui étaient moins évidentes à faire auparavant », souligne Mme Perron.

L’ABITIBI-TÉMISCAMINGUE, RÉGION ÉLOIGNÉE… ET ISOLÉE

Chaque territoire possède ses particularités et ses défis, et l’Abitibi-Témiscamingue n’y échappe pas. Au fil de rencontres, de discussions et d’observations, Madeleine Perron constate que l’Abitibi-Témiscamingue, comme d’autres régions administratives, est une région éloignée, mais qu’à cela s’ajoute une autre caractéristique : l’isolement. « Quand un spectacle prend la route à partir de Montréal et qu’il va jusqu’à la Côte-Nord, il peut passer à Québec, en Gaspésie, au Bas-Saint-Laurent, et même revenir par le Saguenay–Lac-Saint-Jean. Mais ici, quand tu pars de Montréal, tu viens en Abitibi-Témiscamingue, illustre-t-elle. Y’a pas de raccourcis possibles, y’a pas de possibilités de gain pour ces compagnies qui viennent faire des spectacles. »

Pour la directrice du CCAT, cette distinction apporte des défis, mais aussi de l’autonomie. « On n’a pas le choix de s’organiser une vie culturelle, parce que sinon, on ne bénéficie pas des effets collatéraux [de la vie culturelle des grands centres]. On a cette richesse, à notre mesure et avec nos défis. »

 

POUR LA SUITE DES CHOSES

Toujours dans sa mission de travailler au développement culturel de la région, le CCAT a plusieurs projets en branle. En plus de la poursuite de ses objectifs en lien avec le développement numérique, c’est auprès de la jeune relève qu’il prévoit intervenir d’ici les deux prochaines années afin de connaître ses intérêts. « On se rend compte qu’elle est très volatile, elle n’est pas facile à cerner, pas facile à dénicher », remarque Madeleine Perron.

La mise en place de projets collaboratifs est aussi dans la mire du Conseil de la culture. À ce chapitre, on projette de créer des liens avec les régions voisines du Nord-du-Québec et du Nord-Est ontarien. « On a toujours rêvé de faire quelque chose avec le Nord-du-Québec, le Nord-Est ontarien et l’Abitibi-Témiscamingue parce que ce sont nos territoires limitrophes, confie Mme Perron. On veut développer des réseaux d’artistes, des échanges, pour créer des productions qui se promènent un peu partout sur le territoire. »


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