On a beau disséquer les résultats du cinéma québécois au box-office, mais 40 longs-métrages ont trouvé le chemin des grands écrans québécois en 2014. Certains ont mieux performé que d’autres, mais sachez qu’on en produisait à peine dix il y a 15 ans! Il devient non seulement beaucoup plus ardu d’amasser le financement pour la production d’un film, mais il y a un nombre incalculable de cinéastes, de scénaristes et de producteurs qui se battent pour obtenir une part de la tarte qui elle, n’a pas grossi. Mon principal défi depuis l’automne, en plus de l’écriture : trouver un producteur pour tourner ma vue.
25 novembre 2014. Émilie Villeneuve suggère d’inscrire Coney Island à l’événement Le Grand flirt organisé par les Rendez-vous du cinéma québécois. J’hésite. Je tergiverse. Je ne suis pas friand de ces rencontres où tout repose sur la capacité de vendre rapidement une idée. Émilie et mon conseiller à la scénarisation, Benoît Pilon, me convainquent. C’est une occasion unique de m’exposer et de frotter mon scénario à des producteurs crédibles. Je soumets donc mon dossier pour obtenir la confirmation de ma sélection, ô bonheur, au début février. La formule du Grand flirt est simple : 11 producteurs, 10 cinéastes, rencontre à l’aveugle avec chacun d’entre eux. C’est 20 minutes, montre en main, par rencontre!
C’est avec nervosité que je me présente donc à l’INIS pour Le Grand flirt. On entre dans une petite salle où les producteurs sont déjà installés. Sans préambule, on résume notre scénario, on en ressort les singularités, on évoque le chemin de fait, celui qu’il reste à faire, le ton que l’on veut donner, le style, le rythme, le contenu. Je me sens par moment comme dans une version amateur de l’émission Les dragons. Certains producteurs te regardent de haut les bras croisés, d’autres sourient machinalement, alors que certains démontrent de l’intérêt en posant de très bonnes questions : Pourquoi ce titre? Pourquoi telle action arrive-t-elle si tard dans le récit? Qu’apporte ce personnage dans le film? Pourquoi la fiction après le documentaire? Est-ce que tu es capable de diriger des comédiens? Quelle est ta conception visuelle du film? Pourquoi un sujet si intime? Les questions partent dans tous les sens et exigent une somme considérable d’énergie pour répondre avec conviction et de manière intelligible. On défilera devant chacun d’entre eux durant 4 heures! Je termine ce « speed dating » lessivé, mais plutôt satisfait de cet étrange exercice.
Il est très difficile sur le coup, ou même avec du recul, d’anticiper le degré d’intérêt des producteurs dans un contexte si particulier. C’est une curieuse combinaison d’énergie, de séduction, de sensibilité et de chance. Chaque contact est à la fois unique et répétitif, les détails sont importants, mais on doit s’assurer qu’ils aient une idée globale très claire de notre proposition. Plusieurs ne donneront pas suite alors que d’autres liront le scénario. Il ne reste qu’à attendre…