Le programme des Journées de la culture 2014 s’est achevé hier, à l’Agora des arts, par la prestation de l’Orchestre symphonique régional de l’Abitibi-Témiscamingue. L’idée consistait à offrir une séance de répétition au public, qui pouvait poser des questions au chef d’orchestre et aux musiciens pendant les pauses. C’est l’activité qui m’a le plus interpellé, et ceux qui n’y sont pas allés ont raté quelque chose d’extraordinaire. Je m’en vais de ce mot vous dire pourquoi.

C’était l’occasion de voir des gens passionnés par la musique et heureux de se retrouver pour en jouer. Cette vingtaine de musiciens de tout âge forment un groupe avec une belle cohésion, un bel esprit d’équipe. À les voir et à les entendre, j’avais envie d’être multiple pour pouvoir signer plusieurs fois la pétition dans laquelle on réclame la clémence pour les conservatoires de musique régionaux que les politiques ont condamnés à la potence. Par ces temps d’austérité et de vaches maigres, la culture fait office de mammouth à dégraisser. Ainsi pensent nos politiques! Bref, laissons-leur la politique, peut-être qu’ils nous laisseront nos conservatoires, par fair-play.

Je suis sorti de l’Agora au bout d’une heure en me disant que la musique classique n’est pas du tout snobinarde, et encore moins élitiste. Croyez-moi, c’est vrai. C’est un mec un peu platonicien qui vous le dit. Donc un mec fondamentalement contre la sacro-sainte démocratisation-de-tout au nom du dernier chic, l’égalité. Je vous l’accorde volontiers : on n’écoute pas Rachmaninov comme du Pitbull (Pardonnez-moi mon toupet d’avoir mis Pitbull et Rachmaninov dans la même phrase!). Au début, on peut trouver la transition raide. On peut aussi avoir les oreilles qui saignent et les paupières qui jouent les récalcitrantes. Mais qu’on se rassure rapidement : la musique classique possède également de grandes vertus insoupçonnées. Tiens, j’ai un collègue qui vivait dans un appartement situé au deuxième étage. Son jeune voisin du premier ne jurait que par Pitbull et autres faiseurs de tubes clinquants et creux, ce qui l’empêchait de se concentrer pour travailler tranquillement. Au lieu d’aller lui demander de baisser le son, il a eu l’ingénieuse idée de placer ses haut-parleurs dans un coin stratégique et de balancer quelque symphonie de Beethoven à tue-tête. Vous ne me croirez pas, mais ça a marché : plus aucun boucan pitbullesque dans l’immeuble! Il a réussi à avoir la paix pour travailler grâce à Beethov. La musique classique, ça vous dresse un animal sauvage! De toute façon, l’écoute, ça s’apprend. D’ailleurs, l’Orchestre symphonique régional s’est inscrit dans une démarche totalement pédagogique durant sa séance de répétition à l’Agora. Le prof n’est même pas sévère. 

Jacques Marchand, le chef d’orchestre, n’est pas un monsieur austère et grave. Il ne portait même pas de smoking ni de nœud papillon ce dimanche. Et le comble, il menait son orchestre face au public. Sa tignasse argentée et sa moustache assortie lui donnent un charme fou, et il dégage un charisme que doivent lui envier certains politiques (encore eux!). Baguette à la main, au milieu de ses musiciens et face au public, il raconte des anecdotes, il amuse ses musiciens, qui rigolent de bon cœur. Le chef leur demande de reprendre la partition; ils s’exécutent. Il est pédagogue, il est drôle. Au risque de me faire mutiler par les puristes de la langue, j’ai envie d’écrire que c’est un chef cool, mais je ne vais pas le faire ici. Du moins, j’écrirai qu’avec un chef comme ça, c’est agréable de se faire mener à la baguette! 

Pour signer la pétition et éviter la potence aux conservatoires de musique en région, suivez ce lien https://www.assnat.qc.ca/fr/exprimez-votre-opinion/petition/Petition-4823/index.html


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