Cet essai de Léandre Bergeron est d’un abord très différent de ses précédents ouvrages. Nous livrant ses réflexions sur l’être humain, il décrit le cheminement qui l’a mené vers une plus grande liberté et un plus grand équilibre. Et ceci, comme l’annonce le titre, en faisant deux pas en arrière.
L’auteur, de toute évidence, a une assez piètre opinion de l’humain. Conformisme, insécurité, soif de pouvoir – nous sommes selon lui menés par de bien déplorables instincts.
Le premier pas en arrière, présenté brièvement en début d’ouvrage, consiste à prendre du recul face à tout notre conditionnement social. Prendre conscience que beaucoup de nos souffrances viennent de ces dogmes qu’on érige en vérité. Religion, scolarisation, guerre. Ce premier recul nous mène vers ce qu’on appelle couramment la conscience sociale ou l’ esprit critique. Ce premier pas n’est pour l’auteur que le tremplin qui permet de reculer encore, d’un autre pas. Car cette intelligence qui nous permet de comprendre le monde fait aussi grandir notre je, qui nous pousse à nous prendre au sérieux, à vouloir performer et détenir la vérité.
Léandre Bergeron a donc eu ce deuxième pas en arrière, dont la description constitue la majeure partie du livre. En renonçant à s’accorder de l’importance, il vit dans un état qu’il nomme la « conscience affranchie ». Cela lui permet de réaliser à quel point il est futile de se prendre au sérieux et de s’imaginer que quoi que ce soit nous est dû. Désirer les nourritures habituelles de l’ego comme le pouvoir, le succès ou la sécurité ne fait plus de sens. Pour lui, il est évident « qu’on n’est pas grand-chose, qu’on n’est rien du tout, qu’on n’est personne, qu’on n’a droit à rien de particulier (…) qu’on est seul, qu’on ne peut compter sur rien ni personne. »
Pour ressentir cet état d’être qui ne s’embarrasse ni du passé ni du futur, il faut s’observer, penser, demeurer dans la perception pure et délaisser notre envie conditionnée de tout classer et analyser. Se détacher de l’intellectualité et trouver l’équilibre entre nos trois intelligences, celles de la tête, du cœur et du corps.
Loin de se vouloir un mode d’emploi ou un ouvrage de cheminement spirituel, cet essai décrit le parcours intérieur d’un homme de réflexion qui semble avoir trouvé son équilibre. Grande sagesse ou excès de pessimisme face à l’être humain? Probablement un mélange des deux. Et, surtout, une envie de liberté sans concession.