Les 1 %

Jacques Baril : Quand la matière devient poème

Par Ariane Ouellet

Il a fallu que l’hiver finisse pour attraper Jacques Baril au téléphone. Cette dernière chronique sur les œuvres de 1 % lui étant consacrée, il a fallu attendre que la neige soit partie pour qu’il revienne au bercail tel un oiseau migrateur. Entre la ferraille et la neige, son cœur ne choisit pas. Il y va selon la saison et sculpte au gré de sa pelle ou de son arc à souder.

Quand on sculpte du lourd, qu’on installe du gros, qu’on voit grand, il n’y a pas mille solutions pour vivre de son art en région. « C’est pas facile de vendre une grosse sculpture! » s’exclame l’artiste. Peu de collectionneurs millionnaires, encore moins de musée d’art moderne à Gallichan. Pour ces raisons et bien d’autres d’ailleurs, Jacques Baril fait des projets d’intégration des arts à l’architecture, des œuvres institutionnelles, publiques, municipales, des sculptures signalétiques. On retrouve ses projets d’intégration à travers toute la région : au Centre multisports à La Corne, à la Polyno et au Centre hospitalier de La Sarre, au Centre de formation professionnelle de Val-d’Or, à l’entrée de la Salle Augustin-Chénier de Ville-Marie de même que dans les postes de la Sûreté du Québec de La Sarre, Amos et Lebel-sur-Quévillon.

Poétiser la police

Comment un artiste en apparence désinvolte et farfelu, à l’imagination débordante, en arrive-t-il à proposer des titres aussi poétiques que Artisan de son bonheur ou encore Scruter l’horizon pour un poste de la Sûreté du Québec ? « Je pense que comme personne, je contribue beaucoup au succès de mes œuvres », confie l’artiste avec humour, lui qui intègre parfois une présentation performative ou contée lors de ses vernissages.« Même si je cherche à répondre à la commande, je vise avant tout que mes œuvres aient un deuxiè me niveau de sens. »

Les contraintes sont grandes pour les œuvres d’art publiques : durer longtemps, être sécuritaires, plaire au plus grand nombre possible, respecter le budget… Pour Jacques Baril, c’est l’aspect un peu négatif du concept : « Tout doit être léché à un point tel que les œuvres sont souvent très sages. Artistiquement, ce n’est pas avec des 1 % qu’on prend des risques! »

Grâce à une certaine expertise qu’il a développée en la matière, on l’approche la plupart du temps pour des œuvres extérieures. Ses matériaux de prédilection, il les trouve dans le monde autour de lui: machines agricoles désuètes, copeaux de bois, cailloux, pelouse, ferraille en tout genre. Même une vieille citerne de camion attend dans sa cour le moment de se métamorphoser en sculpture. Son heure viendra.

Bien que la majorité des œuvres de 1 % qu’il a réalisées à ce jour soient des petits projets, il rêve grand. « Je voudrais en faire des géants!, dit-il avec enthousiasme. Mon rêve serait de me faire commanditer une grosse machine agricole que je démonterais au complet et que je transformerais en sculpture », fantasme l’artiste. Avis aux intéressés, les visionnaires ne se reposent jamais!


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