C’est lors du dernier Festival du cinéma international en Abitibi-Témiscamingue que le tout dernier documentaire de Patrick Pellegrino a été présenté. En plus de recevoir un accueil chaleureux du public, il s’en est fallu de peu pour que Roger Pelerin, là où on s’arrête en passant remporte le Grand prix Hydro-Québec.
L’action se déroule au cœur de l’un des secrets les mieux gardés d’Abitibi-Ouest, l’île Népawa. Parmi une exotique faune locale, un couple d’oiseaux rares, ni domptés ni sauvages, voue sa vie à l’art et à la contemplation du quotidien. Roger Pelerin est un créateur intarissable, un graveur de génie mais surtout un homme libre. Sa compagne Renée Cournoyer, que l’on découvre aussi, est une femme fascinante et une artiste accomplie.
Le processus créatif
La trame du récit se construit autour de la réalisation d’une œuvre majeure de Pelerin portant sur l’histoire de l’île Népawa, lieu de passage des Algonquins, des colons du plan Vautrin, des Madelinots, des hippies et des touristes. Au fil des mois, on découvre l’artiste en pleine création, à la recherche du matériel historique qui lui permettra de bâtir son œuvre. Pour faire apprécier la complexité technique du médium, le sujet aurait mérité qu’une plus grande importance soit accordée aux scènes d’atelier. Comme le dit l’artiste lui-même, la linogravure comporte trois métiers, celui de dessinateur, celui de graveur et celui d’imprimeur, et rares sont les artistes qui ont atteint la maîtrise de cet art autant que Pelerin.
Filmer une île
Toutefois, le film nous donne à voir les paysages magnifiques de l’île à toutes les saisons, autant de clins d’œil à l’œuvre de Pelerin où foisonnent parties de pêche blanche et vues aériennes de son patelin d’adoption. On sent par un montage réussi le rythme lent du quotidien qui s’égraine, les couchers de soleil, la lumière éblouissante des grands froids.
À travers des scènes ordinaires de la vie de tous les jours, on sent aussi la complicité dans ce couple, l’admiration et l’acceptation de l’autre, la lucidité d’une vie à travers l’alcool. Mais plus qu’un portrait d’artiste, le film de Pellegrino est un paysage, celui d’une île habitée par des êtres uniques et colorés qui ont choisi d’y vivre à leur façon, loin du trafic et du stress de la ville.
Patrick Pellegrino a étudié les communications à l’UQAM et le cinéma à l’Université de Montréal. Recherchiste, scénariste, réalisateur et directeur photo, il a à son actif plusieurs films ayant pour sujet la marginalité, dont le documentaire Sans réserve portant sur les Algonquins de Kitcisakik.