Quand cette affaire a commencé, il y a six mois, je ne croyais pas avoir à écrire sur elle. Je n’imaginais pas, à mon tour, devoir expliquer à un gouvernement comment il doit respecter les gens de ma ville. Au départ de cette histoire insensée, je me disais que ça se règlerait rapidement. Après tout, on a un nouveau gouvernement n’est-ce pas?

Au mois d’avril dernier, des parents d’enfants du quartier Notre-Dame à Noranda apprennent que leurs petits sont anormalement surexposés à l’arsenic, un élément chimique hautement toxique. La norme émise par Québec est de 3 nanogrammes par mètre cube (ng/m3). L’exposition pourrait être 67 fois plus élevée dans leur quartier. Cet arsenic, présent dans l’air de ma ville et respiré par nous tous, résulte des opérations de la fonderie, propriété de Glencore, qui domine le paysage de Rouyn-Noranda. Et il y a peut-être toujours eu trop d’arsenic dans notre air…

Une recherche sur le Web m’apprend que des concentrations d’environ 10 ng/m3 ont été détectées en 2018 à Montréal-Est. Elles provenaient de l’usine CCR propriété, elle aussi, de Glencore. La population, la Direction de la santé publique et les élus municipaux ont demandé que l’usine respecte la norme québécoise. Elle a fini par se doter d’un équipement capable d’abaisser, en théorie, la présence de ce poison. Comme à Montréal-Est, le gouvernement autorise la fonderie Horne à polluer au-delà de sa propre norme. Sans que l’on nous ait expliqué pourquoi, on l’autorise à relâcher jusqu’à 200 ng/m3. Ici, ce n’est pas juste la compagnie qui est en cause, même s’il apparaît amoral d’empoisonner l’air que respirent ses employés, leur famille et leurs amis. Non, c’est l’État qui lui permet de continuer.

Un comité de citoyens, tout ce qu’il y a de poli, demande que les normes soient respectées. Des médecins, la Direction de la santé publique, des groupes communautaires, le conseil municipal de Rouyn-Noranda et la Conférence des préfets de notre région demandent d’agir et de faire respecter les normes en matière d’exposition à ce poison. Or, jusqu’ici, aucune reconnaissance du problème n’est venue de notre gouvernement. Le ministre responsable de la région a dit, lors d’une entrevue rapportée par Radio-Canada le 25 août dernier, qu’« il fallait arrêter d’être toujours sur le piton d’alarme ». Pire, le premier ministre a déclaré à l’Assemblée nationale le 9 octobre dernier au sujet du problème que « les risques pour la santé sont minimes ».

Il existe, dans le domaine de la santé, ce qu’on nomme le principe de précaution. Celui-ci propose de ne jamais courir de risque avec la santé de la population en respectant les normes environnementales.

Maintenant, je me demande si les risques pour la « santé politique » d’un gouvernement seraient « aussi minimes » si tout cela se passait au pied du Mont-Royal.

Calvaire, il est pour quand le respect? Le simple respect des normes?


Auteur/trice