Un doux soir d’automne, celui de l’ouverture du Festival du cinéma international. Après les discours protocolaires d’usage, des artisans présentent, avec beaucoup d’humilité, leurs œuvres. Les mots lumière, luminosité, lumineux; ces mots prononcés ont eu, sur moi, un effet jamais éprouvé auparavant. Car ces modeleurs, ces faiseurs d’images comprennent trop bien que rien ne se crée sans lumière, sans au moins une toute petite lueur. Tandis que mon regard s’adaptait à la pénombre de la salle et à celle de notre monde, ces mots se fixaient sur ma rétine.

 

Oui, il y a d’abord le soleil, de moins en moins présent. Mais ce sont également, dans notre région, ces sombres histoires de policiers agresseurs. Et ces appels à la bombe qui ont provoqué l’angoisse à la fois des parents et des enfants. C’est tout l’Abitibi et le Témiscamingue qui se cherchent une voie à tâtons, après que l’austérité eut massacré leurs structures de gouvernance et quoi encore. Ce sont ces millions de réfugiés fuyant guerre et misère. Et ces nuages de carbone, qui obscurcissent l’avenir de notre unique navire.

 

Je ne suis plus du genre à marcher tête basse en me décourageant des défis qui sont nôtres. Il arrive toutefois que je sois frappé par l’ampleur de la tâche. C’est la raison pour laquelle je n’ai de cesse d’évoquer notre humanité et la nécessité de nous unir pour ramer à contre-courant. Je me sens incapable de porter des lunettes roses, car elles n’aident pas à trouver le bon chemin… Comme on se disait, lorsque j’étais reboiseur : le terrain est sale, ça ne nous empêchera pas de planter nos arbres, mais il reste sale.

 

Revenons à la soirée d’ouverture du Festival. En tentant de saisir l’éclat du regard de ces créateurs, je me suis dit que la lumière ne peut venir que de notre envie de la chercher. Cette recherche-là, seulement celle-là, c’est assez pour éclairer quelques pas. C’est ce profond désir de traduire nos univers en images, en mots, en musique, en œuvres d’art qui allument la création. Nous osons alors poser notre regard sur ce que nous ressentons puis osons modeler, rêver la réalité. Et, quoi qu’il advienne, le goût de vivre engendre celui de continuer à créer. À poursuivre la recherche de soleil jusqu’au printemps.

 

Lorsqu’une personne nous quitte, on dit d’elle qu’elle s’est éteinte. Nous, qui sommes toujours vivants, faisons tout pour ne pas mourir et demeurer enflammés. Plus nous serons lumineux et plus nous arriverons à voir loin, au-delà, bien au-delà de nos pas, plus nous permettrons de donner vie et faire croître nos plans. Et si, même si, même si… on croise des regards incertains ou assombris comme il s’en trouve beaucoup par ces temps froids, au moins il fera déjà plus clair.

 

Ce texte est écrit à la mémoire lumineuse et souriante de mon ami André Marcoux qui nous a quittés le 5 novembre dernier. \

 

 

 

 


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