À la 38e édition du Festival du cinéma international en Abitibi-Témiscamingue, nous aurons la chance de voir, en première mondiale, le dernier film de Béatriz Médiavilla Habiter le mouvement. Ce film poétique rend compte de la tournée de l’important chorégraphe français Thierry Thieû Niang qui a présenté des ateliers de danse intergénérationnels auprès de non-danseurs à travers le Québec.

Béatriz Médiavilla a dansé une grande partie de sa vie. Elle aime la danse et la comprend, ce qu’elle avait déjà démontré avec son premier film Danse avec elle, un portrait de l’intérieur tout en nuance de la chorégraphe et pédagogue Lynn Vaillancourt.

Pour son deuxième film, la réalisatrice ne s’est pas occupée de l’aspect factuel de ces ateliers; ce qui l’intéressait vraiment était de faire œuvre elle aussi. Sans rien trahir de la beauté des chorégraphies et du vécu des participants au projet, elle réussit à construire, à partir du matériel des ateliers, un poème dont la portée parvient à nous communiquer, beaucoup mieux qu’un documentaire classique, la dimension authentique de l’expérience.

Dès la genèse du projet, Béatriz Médiavilla voulait s’affranchir du documentaire de type cinéma-vérité. « Faire ce portrait en y plaçant ma prise de paroleme semblait une piste vraiment intéressante et faire le montage dans un contexte de telle liberté est devenu très agréable et stimulant. »

En fait, les choix esthétiques de la réalisatrice servent son sujet. Ils rendent le film sensible et l’émotion est là, vivante et palpable. Elle arrive à nous faire comprendre la danse sans avoir recours aux impressions des danseurs et danseuses non professionnels. Le film va au-delà des ateliers et Béatriz Médiavilla nous amène dans une autre direction, dans les rapports que les participants entretiennent avec le corps. Leur corps à eux, le corps des autres, le corps vieillissant, le corps nomade, le corps politique, le corps comme artéfact. Les témoignages offrent une nouvelle signification aux images des ateliers. Le propos du film s’élargit de plus en plus au fil des images, incluant tout l’environnement dans une intégration poétique de la place qu’occupe la danse dans le monde qui nous entoure.

Le choix des intervenants est intéressant (pensons en particulier au récit de Joséphine Bacon) et les images sont absolument magnifiques, entre autres celles des danseurs et danseuses non professionnels filmés avec amour et respect.

On doit souligner également la trame sonore. La musique doublée très souvent de sons provenant de la nature (surtout le son de l’eau, omniprésent dans de nombreuses scènes) accentue l’intégration de la danse dans le monde.

Béatriz Médiavilla a pris le parti de laisser parler le corps dansant. Les résultats des ateliers sont là, devant nous. La parole nous amène ailleurs. Le film devient un voyage au sein de l’expérience même de la danse, à la fois expérience intime et publique. En soi et vers l’autre. En ajoutant cette strate poétique, la réalisatrice va aux racines mêmes de la danse. Et elle nous émeut.

Le film sera projeté en première mondiale au Festival du cinéma international en Abitibi-Témiscamingue, le mardi 29 octobre prochain.


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