Lui, surnommé affectueusement « l’gros trappeur », c’est Pascal Laliberté. Elle, avec ses petits bottillons à talons aiguilles, c’est Claude Cardinal. Ensemble, l’homme des bois et la fille de ville ont mis sur pied un petit atelier à Nédélec au Témiscamingue, devenu aujourd’hui un commerce de traite de fourrures et de design audacieux où rien ne se perd, tout se transforme. Bienvenue chez L’Gros Trappeur Fourrures.

« C’était mon rêve d’avoir un jour mon entreprise », lance Claude Cardinal. « Je n’aurais pas pensé que c’était autant de gestion, et nous avons de nouveaux développements continuellement », explique-t-elle. Arrivée au Témiscamingue depuis près de 20 ans, elle ne pensait pas qu’elle allait y réaliser ce rêve et trouver l’homme de sa vie. « Je me souviens de mon arrivée au Témiscamingue. C’était le 7 janvier 1999 et ce jour-là, c’était un record de froid ». Tranquillement, elle y apris racine, jusqu’à unir sa destinée à un homme des bois « qui a ça dans le sang ».

« Pascal, c’est un vrai coureur des bois, mais son objectif est aussi de démystifier les métiers qui se rattachent à la forêt et qui sont tous liés entre eux. C’est le respect de la nature, l’éthique du travail », mentionne Claude Cardinal. Elle explique que les trappeurs travaillent régulièrement en collaboration avec les agents de la faune pour la gestion des animaux nuisibles, pour le dépistage de certaines maladies comme la rage du raton laveur ou encore pour récupérer des spécimens vivants porteurs de virus contagieux qui ont besoin d’être étudiés.

ARTISANS ENTREPRENEURS

Si L’Gros Trappeur a mis en place des partenariats avec de grandes compagnies, dont Pajar, Kanuk et M0851, il n’est pas question de grossir trop vite ni de devenir trop commercial. « Nous tenons à notre couleur artisanale. Nos fourrures restent naturelles, sans teinture, et on ne veut pas devenir une multinationale », insiste Claude Cardinal. L’entreprise achète également la fourrure brute de trappeurs ou de chasseurs, mais se donne aussi le droit de refuser certaines prises.

Chez L’Gros Trappeur, tout ce qui entre est transformé. La viande est consommée, les peaux et le cuir sont utilisés pour les bottes et les mitaines. Les retailles servent à la confection d’oreillers. Les autres restes se transforment en ornements (comme des pompons ou des porte-clés) et les résidus sont utilisés pour la confection de bijoux. À la toute fin, s’il reste encore des poils, ils sont transformés en pinceaux ou en mouches à pêche. Les os, les dents et les griffes sont aussi intégrés dans des bijoux. « Nous avons même une nouvelle avenue pour le gras d’ours. Christel Jacob, qui vend les produits Feuilles de lune, l’intègrera dans des savons. Ses produits sont d’ailleurs en vente à la boutique du Gros Trappeur », précise-t-elle.

Outre la boutique et la salle d’exposition où trône notamment un manteau vieux de 141 ans ayant appartenu à Mérule de la Chevrotière, aïeul de Pascal Laliberté, l’atelier de Nédélec inclut une tannerie et tout ce qu’il faut pour préparer les peaux. Les équipements ont été conçus en partie par Pascal Laliberté. On y trouve également une pièce réservée à la taxidermie où prennent forme des naturalisations tout à fait réalistes des prises de chasse ou de pêche. « Pour trapper, il faut prendre le temps d’aller en forêt, ce n’est pas un geste de cruauté. Il y a une éthique à respecter. C’est important pour nous », conclut Claude Cardinal.


Auteur/trice

Lise Millette est journaliste depuis 1998, tant à l'écrit qu'à la radio. Elle a également été présidente de la Fédération professionnelle des journalistes du Québec (FPJQ). En Abitibi-Témiscamingue, elle a été rédactrice en chef de L'Indice bohémien en 2017 et depuis, elle continue de collaborer avec le journal.