Mélissa Veilleux est une survivante. Victime d’un traumatisme crânien suite à un accident du travail il y a trois ans, elle ne peut reprendre le travail qu’elle occupait depuis 14 ans et qu’elle aimait.

Tous les traumatisés crâniens vous le diront : il est difficile de reprendre sa vie d’avant.  Le cerveau ne fonctionne plus de la même façon, il faut réapprendre des trucs, trouver d’autres stratégies pour arriver à faire ce qu’on faisait avant. 

L’accident de travail de Mélissa Veilleux est particulier : préposée aux bénéficiaires en psychiatrie, elle a été agressée par un patient.  Au traumatisme crânien s’ajoute le traumatisme psychologique.  C’est dans cette perspective que Mélissa a suivi des séances d’art thérapie qui lui ont permis de travailler à la fois les problèmes cognitifs et psychologiques liés à son accident.  Elle a découvert quelque chose d’important :  « Un dessin, c’est ben plus stoole  qu’on pense ».

Cette découverte l’a amenée vers les arts visuels. Elle qui n’avait jamais touché à l’art  y trouve non seulement du réconfort, mais une nouvelle voie/voix.

« Depuis que j’ai découvert la peinture », a-t-elle confié, « je n’ai plus froid en dedans ». L’art-thérapie lui a permis de comprendre qu’elle avait toujours eu froid; elle a avoué avoir beaucoup consommé autrefois pour chasser ce malaise.

Après les ateliers d’art-thérapie offerts par son programme d’aide aux employés à la suite de son accident de travail, elle a fréquenté les ateliers de Carmen Branconnier à Macamic, ateliers qui lui permettaient de sortir de la maison et de « chasser le froid ».  Mais ces ateliers deviennent bientôt insuffisants. Elle décide alors de s’inscrire à l’Université du Québec en Abitibi-Témiscamingue, en janvier 2015 au Certificat en arts plastiques. En septembre 2015, elle enchaîne avec le Certificat en peinture, et mène de front ces deux formations.

Ses débuts ont été difficiles. La différence entre l’art-thérapie et la pratique de l’art en tant que tel ne lui paraissait pas évidente au premier abord. Cependant, elle a persévéré et a réussi à s’affranchir de l’aspect thérapie. Car il faut comprendre que l’art-thérapie est un outil afin d’intervenir auprès des clientèles ayant des problèmes psychologiques.  Le but est de guérir ou à tout le moins d’identifier les fondements du problème.

La pratique de l’art est un but en soi :  c’est la production artistique qui compte et non pas le sens psychologique qu’on peut lui donner dans la constellation personnelle de l’auteur.

Il s’agit d’un défi énorme pour quelqu’un qui souffre des séquelles  d’un traumatisme crânien.  Mais Mélissa Veilleux est une survivante, une battante, et voit maintenant s’ouvrir devant elle un monde de possibilités.

Elle veut devenir artiste professionnelle.  Elle y parviendra sans doute.  Avec le temps, les effets du traumatisme s’atténuent même si les dommages ne vont que s’étendre : la plasticité du cerveau humain fait en sorte qu’il installe de nouvelles connections, de nouvelles routes pour fonctionner le plus efficacement possible.

Mais surtout, pour elle, c’est une prise de contrôle sur elle-même, sur son corps comme sur son esprit.  « Je ne mettrai plus jamais ma sécurité dans les mains d’autrui » dit-elle avec force.  Elle s’est réapproprié sa vie grâce à l’art. Elle n’a plus froid.


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