16 h 26. Un ridicule réduit me tient lieu de bureau. Depuis une bonne demi-heure, j’essaie de pondre ce papier sur la danse et la musique dans les résidences pour personnes âgées. Pour échapper aux bruits de mes collègues qui déboulent de partout en cette fin de première journée du semestre, j’ai fermé ma porte. Une chaleur moite me tombe sur les tempes avec ses poings saignés à blanc. J’ouvre la fenêtre pour la semer. Le bruit lourd et lancinant des machines qui refont une virginité à l’asphalte me fend le crâne.

  

C’était un peu plus tôt dans la journée. 13 h 30 pour être précis. Je venais de pénétrer dans ce bâtiment maussade, retiré de la clameur de la ville tout en y étant. J’ai longé un premier couloir, précédé d’une amie journaliste venue couvrir l’événement. Ensuite, j’ai tourné à droite. Ils étaient là, tous avec des cheveux gris. Certains marchant péniblement. D’autres, avec moins de difficulté. La résidence Saint-Pierre inaugurait sa bibliothèque. Après quelques mots des membres du personnel, une porte s’est ouverte sur des étagères de bouquins soigneusement rangés par ordre alphabétique. Sur la porte, un tableau de Madeleine Dupuis, elle-même pensionnaire de la maison, représente un personnage lisant dans une bibliothèque. Margot Vallières, retraitée de l’enseignement, et Paco Bergeron, infirmière à la retraite, peuvent être fières de leur réalisation.

Margot Vallières et Paco Bergeron n’en sont pas à leur premier coup. Elles organisent des activités pour permettre aux résidents de se divertir et de se constituer un réseau social. Le cinéma, la musique, la danse, plein de petites choses qui rendent les jours moins longs. Certes, les pensionnaires des résidences ne dansent pas leur vie. Mais ils ont une programmation de musique à faire pâlir. Un musicien leur offre un spectacle tous les mois à l’occasion de ce qu’on appelle la fête des résidents. Les occasions telles qu’Halloween ou Noël représentent également des moments intéressants où les résidents vont danser. Souvent avec des participants (membres de leur famille) qui viennent de l’extérieur. En plus des tournées effectuées à la résidence par des festivals comme le FME, les pensionnaires peuvent compter sur une entente conclue avec le Centre musical En sol mineur pour des concerts de musique classique. Daniel Poliquin, responsable de l’animation, se réjouit de voir que certaines personnes arrivent à la résidence seules et se tissent un réseau solide grâce aux diverses activités.

Même si la plupart des résidents ne peuvent pas mettre le feu sur la piste de danse, Margot Vallières constate qu’ils aiment écouter la musique et regarder les autres danser. La danse et la musique créent une énergie nouvelle chez les pensionnaires. À chaque occasion, ils revivent leurs souvenirs enfouis sous les plis du temps et s’inventent une nouvelle jeunesse. Ils doivent se dire que « la vieillesse est si longue qu’il ne faut pas la commencer trop tôt ». Sans doute. Comme Benoîte Groult.


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