À tout jardinier prétendant faire du jardinage biologique, il est permis de demander à voir son tas de compost, car compostage et jardinage biologique vont de pair.


Quel phénomène extraordinaire que ce lent processus de transformation de la matière organique en un fertilisant biologique de grande valeur, pour un sol en évolution constante! En campagne, il va de soi que le jardinier qui élève poules, chèvres, vaches ou chevaux fasse son compost. Il a en effet, sous la main, tout ce qu’il faut pour mettre en œuvre une formidable usine à fabriquer des micro-organismes capables d’améliorer de beaucoup la structure d’un sol.


On aura soin de ramasser tout ce qui peut se décomposer : feuilles mortes, paille, déchets de cuisine, mauvaises herbes, litières et fumiers. Idéalement, la proportion entre l’apport en azote et celui en carbone sera d’un pour dix, c’est-à-dire dix fois plus de végétaux que de fumiers. Le principe, ici, se compare aisément à la méthode utilisée pour ensemencer deux litres de lait au moyen de quatre cuillerées à table de yogourt. Il s’agit de faire en sorte que l’azote, présent en petite quantité, s’empare, en quelque sorte, de tout le tas pour le transformer en matière organique fertilisante pour le jardin. Cependant, on en n’est pas à une cuillère près dans un tas de compost. Aussi bien dire que ces proportions sont suggérées à titre indicatif

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En ville, même sans la présence d’azote dans un tas plus petit (l’espace disponible est tout de même déterminant), la matière organique entassée donnera quand même des résultats. Cependant, il faut voir, sur quelques mois, le travail des micro-organismes dans un amas de compost aux dimensions plus imposantes.


D’abord, le tas de bonnes dimensions (2m X 2m X 2m en forme de trapèze) se mettra à chauffer, dans la mesure où les matières organiques en présence auront été empilées encore fraîches et en alternance avec celles d’une autre nature, comme la cendre de bois. Cette étape «feu» durera quelque temps. Comme la chaleur peut atteindre une certaine intensité, au-delà de 40ºC parfois, il sera d’une importance capitale de percer le tas régulièrement afin d’y introduire l’élément «air» et de l’arroser par les ouvertures ainsi pratiquées par temps sec, afin que le travail des enzymes et bactéries utiles puisse se réaliser. Par contre, il faut savoir que les bactéries pathogènes et les graines de mauvaises herbes, elles, seront détruites par l’action de ce chauffage. Il faudra ensuite veiller à maintenir le taux d’humidité pour que l’élément «eau» se manifeste.


À cette étape, quelques variétés de champignons peuvent apparaître, indicateurs de minéralisation et d’équilibre. Un peu plus tard, en soulevant d’un coup de fourche la couverture de paille, qui aura été préalablement ajoutée, on constatera la présence de lombrics. S’ils sont là, c’est qu’on aura pris soin d’installer le tas sur la terre ferme et non sur le ciment. Ils viennent d’eux-mêmes, nombreux, jeunes, très actifs et excellents composteurs, témoigner de la réussite en faisant place à l’élément «terre» qui était le but à atteindre. Un an se sera écoulé et le tas aura diminué des deux tiers de son volume. Ne reste qu’à introduire au jardin, à l’automne ou le printemps venu, ce compost qui vaut son pesant d’or.


Auteur/trice

Chroniqueuse autodidacte pour L'Indice bohémien et pour le Journal Le Pont de Palmarolle. Les sujets couverts touchent, entre autres, l'actualité, la lecture, le jardinage, le végétarisme, l'interprétation de l'objet patrimonial, les arts visuels, le portrait, l'amour de la nature et de la culture. Prix de l'AMECQ 2019 pour la meilleure chronique Notre région a cent ans.