Sept ans après avoir quitté le Témiscamingue pour poursuivre ses études en cinéma et s’établir dans la région de Montréal, Sarah Baril Gaudet revient sur le sol de ses origines pour réaliser un projet de long métrage documentaire sur l’exode rural des jeunes. Ses échanges avec de jeunes Témiscamiens la replongent dans un dilemme opposant enracinement et désir ou besoin de partir.

 

« Ces zones ne sont pas que frappées par l’exil. Je veux montrer la beauté du territoire avant tout et comment ça peut forger la personne que l’on est. Je ne serais pas l’artiste que je suis si je n’avais pas vécu au Témiscamingue, au Verger des Tourterelles », affirme Sarah Baril Gaudet.

Si elle soutient que sa vie est maintenant dans la région de Montréal, où l’ont suivie ses parents et où vit aussi sa sœur, la jeune réalisatrice conserve néanmoins un attachement de cœur envers sa région. C’est d’ailleurs en prenant conscience d’une certaine précarité territoriale qu’elle a décidé d’en faire le sujet de ce premier long métrage financé par le Conseil des arts et des lettres et Téléfilm Canada. Sarah Baril Gaudet avait d’ailleurs déjà abordé le thème du territoire dans son premier court métrage documentaire, Là où je vis, qui raconte la solitude d’une jeune Inuk tiraillée entre rester ou partir de son village du Nunavik.

Cette fois, le déclic a été provoqué par un article publié dans le journal La Terre de chez nous intitulé « Des achats de terres qui dérangent ». On y détaillait le problème de l’accaparement des terres par des investisseurs étrangers. Ébranlée et inquiète, elle reconnaît s’être sentie interpellée. « Depuis mon départ, c’était la première fois que je m’intéressais au sort de ma région natale ».

Elle se rend ensuite à la rencontre de jeunes Témiscamiens à l’école Marcel-Raymond de Lorrainville. Les témoignages des jeunes rencontrés révèlent un profond attachement et un sentiment de fierté.

« Ils m’ont permis d’avoir une vision différente du territoire », concède-t-elle. Elle reviendra à leur rencontre en juin, juillet et août 2019 pour compléter le tournage de Passage.

Sarah Baril Gaudet aborde son film à la manière du cinéma d’observation, avec des éléments plus contemplatifs. C’est une immersion dans le quotidien de jeunes ruraux ancrés dans leur milieu.

Dans la présentation de son projet, la cinéaste constate que la région du Témiscamingue « voit ses villages se dépeupler à un rythme croissant. Les écoles primaires ferment leurs portes une à une et le milieu agricole vit ses moments les plus difficiles avec la vente accrue de ses terres ».

En allant à la rencontre de jeunes qui font le choix de rester, elle est allée à la rencontre de points d’ancrage.

« Les gens ont un profond sentiment de liberté en fait. Le rythme est différent de celui de la ville », soutient-elle, affirmant qu’un de ses objectifs est de démontrer « qu’il y a de l’espoir », non seulement pour le Témiscamingue, mais aussi pour d’autres régions qui composent avec la même réalité. « On parle du Témiscamingue, mais ça se reflète dans plusieurs autres régions. »

Avec Passage, Sarah Baril Gaudet verra son travail présenté en salles et, on ne sait jamais, peut-être aussi au Festival de cinéma de Rouyn-Noranda.


Auteur/trice

Lise Millette est journaliste depuis 1998, tant à l'écrit qu'à la radio. Elle a également été présidente de la Fédération professionnelle des journalistes du Québec (FPJQ). En Abitibi-Témiscamingue, elle a été rédactrice en chef de L'Indice bohémien en 2017 et depuis, elle continue de collaborer avec le journal.