Depuis quelques années, Claude Boulianne trace sa voie dans l’univers littéraire régional. Originaire de Baie-Comeau, le Rouynorandien d’adoption a notamment contribué au recueil Abitibi/Montréal et a cofondé pendant le confinement le défi littéraire « À 190 mots de distance », auquel ont participé des centaines de personnes. Depuis le 14 octobre, on peut se procurer en librairie son premier roman, Telosphobie, paru aux Éditions du Quartz.
Roman d’anticipation, Telosphobie met en scène un Québec où l’aide médicale à mourir est accessible à tous les citoyens, peu importe leur état de santé. Dans les quatre parties composant l’œuvre, l’auteur explore divers aspects de cette réalité où la vie et la mort sont tout à fait manipulables. On y suit par exemple un homme recevant une formation pour devenir « récupérateur », comme on appelle ceux qui recueillent les corps des gens ayant choisi de se donner la mort; un homme au service d’une puissante compagnie pharmaceutique, à la recherche de la substance létale parfaite; ou encore une chirurgienne récupérant les organes d’un homme s’étant donné la mort et préparant en parallèle son entrevue pour accéder au droit d’avoir un enfant.
Bien que les personnages se croisent dans la dernière section du livre, lui donnant la forme d’un roman choral, les quatre parties se lisent comme des nouvelles, un genre littéraire que Claude aime particulièrement. Si elles se situent toutes dans un même univers, chacune présente tout de même des personnages, une histoire et une chute qui lui sont propres. Claude reconnaît que chaque histoire aurait pu devenir un roman complet et être développée plus en profondeur, mais il lui importait d’offrir un regard pluriel sur la réalité présentée et d’explorer plusieurs points de vue.
Tout au long du roman, l’auteur propose un regard parfois cru et souvent ironique sur cet univers qu’il mène parfois à la limite de l’absurdité. Le sujet peut sembler lourd, mais il est traité avec un réel plaisir d’écrire et la volonté évidente de créer un univers réaliste, où les failles du système et les enjeux éthiques ne sont pas laissés ce côté.
En entrevue, Claude Boulianne confie qu’il cherche par l’écriture à explorer d’autres réalités. Il aime extrapoler, exagérer, se demander ce qui serait arrivé si tel ou tel événement s’était déroulé autrement. Si Telosphobie s’accorde parfaitement avec ce désir de s’éloigner du présent et du monde réel, Claude ne cache pas le fait qu’on y retrouve aussi beaucoup de lui et de son propre parcours. La « télosphobie », terme imaginé pour décrire la peur de la fin s’inspire de sa propre relation difficile avec la finalité des choses. Il raconte d’ailleurs une anecdote selon laquelle, enfant, il s’empressait d’éteindre le téléviseur avant la fin de l’émission qu’il regardait.
Interrogé sur ses projets à venir, Claude ne promet rien de précis, mais assure que sa tête bouillonne d’idées et que ses tiroirs ne manquent pas de textes à finaliser, laissant croire que ce roman est loin d’être sa dernière aventure littéraire.