La rouynorandienne Marie-Andrée Rompré a publié en janvier dernier son premier roman, Livre de plage, un livre rafraîchissant qui nous plonge dans l’ambiance ensoleillée des Caraïbes. Inspirée par les circonstances actuelles, cette passionnée d’écriture partage avec nous un texte inédit.


Monique Bernier, joyeuse femme de 80 ans, lorsqu’elle corrige mes manuscrits, me pose toujours la même question : « As-tu quelque chose à dire, Marie-Andrée? »

Ce jour-là, c’est ce que j’avais à dire…

Nous sommes un paysage…


 


Si l’on tentait de définir son étymologie, je dirais que le mot paysage vient de pays et de visage.

Pour moi, c’est la plus belle façon de décrire le monde dans lequel nous vivons. Mon pays, ce sont les dizaines, les milliers de visages qui m’entourent. Qui me sourient, me saluent, me boudent ou m’évitent.

Un pays se compose de toutes les humeurs, de toutes les caractéristiques propres à chacun, chacune de nous.

Vos individualités, avec leur multitude de couleurs arc-en-ciel, colorent mon paysage. Toutes ces personnes qui me sont chères, vous ne les connaissez peut-être pas, comme je ne connais pas les vôtres, mais ensemble, nous sommes un tout cohérent. Une belle phrase poétique. Un ensemble de matière et de lumière. Car ensemble, ce tout collectif devient une unité. Ainsi, tout ce qui nous divise nous rassemble désormais. Notre pays. Tous nos visages. Les grimaces de mes enfants, le sourire de ma mère, la ride d’anxiété sur mon front et sur celui de mes amies, les yeux de ma soeur, le baiser de mon chum, le clin d’oeil d’un collègue, les yeux fermés d’un inconnu.

Tous ces regards qui se croisent sans se toucher, je vous salue, car moi aussi j’ai peur. De ce changement qui vient déformer mon paysage. De cette lutte à venir. Mais je sais, au fond, bien au-delà de la peur, que les jours meilleurs reviendront. Car l’espoir, dans toutes les nations, au fil des siècles passés, a toujours été à nos côtés.

Je serai fière de vous croiser dans la rue dans quelques semaines, et sur mon visage libéré de tout ce fardeau, vous reverrez un pays. Qui a fait la bonne chose au bon moment. Pour éviter le pire.


 


Bravo à nous! Pour ce courage de ne rien faire. Car l’inaction reste, d’après moi, la pire chose à supporter lorsque l’on se définit par le regard des autres…