Après la Ville de Québec et le Saguenay–Lac-Saint-Jean, c’était au tour de l’Abitibi-Témiscamingue d’accueillir Projet 5 courts, une initiative de l’Office national du film du Canada (ONF) visant à explorer le genre documentaire court avec des centres d’artistes ou de production issus des régions du Québec.

Réalisée en partenariat avec la boîte abitibienne Nadagam films, la troisième mouture du projet mettait en valeur les créations de cinq réalisatrices, dont deux issues de la communauté anicinabe Kitcisakik. C’est ainsi que Gabrielle Cornellier (Orteils talons orteils talons), Délia Gunn (Délia de 9 à 5), Evelyne Papatie (Les enfants des nomades), Jessy Poulin (La charge mentale pour les nuls) et Émilie Villeneuve (Mamie et Mia) ont relevé le défi de créer un très court métrage destiné au Web à travers un processus de production entièrement professionnel.

DES CONDITIONS PROFESSIONNELLES, (ENFIN!)

Le contexte de travail des cinéastes qui travaillent en région est difficile. Ils doivent souvent prendre en charge plusieurs aspects de la production, et comme peu d’entre eux vivent de leur art, il reste peu d’espace pour la création. Même si elle a participé à de nombreux projets par le passé, Émilie Villeneuve s’est sentie soulagée par l’encadrement dont elle a bénéficié à travers Projet 5 courts : « C’est la première fois que je ne suis que réalisatrice. Je n’avais pas à tasser de spot au tournage ni à faire signer de release pour mes participants. La production a réservé mon billet d’avion, ma chambre d’hôtel… j’avais une équipe chevronnée autour de moi, alors je pouvais me consacrer à la création. C’est ça, être réalisateur à temps plein! » s’exclame-t-elle. Jessy Poulin est du même avis : « Les professionnels avec qui nous avons travaillé se sont approprié nos projets comme si c’était les leurs. On n’est pas habitués à ça! Nous devons tellement nous débattre dans ce milieu-là, alors quand on a de l’aide, on peut vraiment se concentrer sur ce qu’on a à dire », explique-t-elle.

 

S’ASSUMER EN TANT QUE RÉALISATRICE

La profession étant majoritairement masculine, la parole des femmes y est souvent ténue. « Quand une femme fait un film, c’est souvent vu comme un “film de filles”, ça rejoint moins les gens et c’est intimidant. Alors quand une institution comme l’ONF arrive et qui dit “je veux savoir ce que TOI tu as à dire, c’est intéressant et je vais mettre une grosse équipe derrière toi pour l’exprimer”, ça donne confiance », explique Émilie Villeneuve.

Des rencontres d’équipe sous forme d’activités de création ont d’ailleurs poussé les jeunes réalisatrices à sortir de leur coquille. « En échangeant entre nous, on a vu que certaines choses que nous vivions touchaient aussi les autres participants. Ça nous a forcés à dire ce qu’on pensait vraiment et à nous rendre compte que ça pouvait intéresser d’autres personnes », poursuit Émilie Villeneuve. « Je crois que c’est la première fois que je m’assume en tant que réalisatrice », conclut Jessy Poulin.

Si cette expérience a permis de faire valoir le talent des réalisatrices d’ici, espérons qu’elle contribuera également à l’amélioration des conditions de travail et à l’essor de la profession en Abitibi-Témiscamingue.

Les films du Projet 5 courts – 3e édition ont été lancés devant public lors du 37e Festival du cinéma international en Abitibi-Témiscamingue en novembre dernier. Ils peuvent être visionnés sur le site Web de l’ONF. 


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