Fiasco est un nom masculin qui se définit tout d’abord comme une défaillance sexuelle chez l’homme. Mais ne nous attardons pas ici… il y a plus intéressant, et ça se passe à l’Agora des Arts de Rouyn-Noranda, trois fois par semaine, les mercredis, jeudis et vendredis. Chaque représentation est unique avec un invité spécial différent. Et il faut faire vite, car la dernière occasion d’être témoin d’un fiasco exceptionnellement bien organisé est le 29 juin.
Amoureux des livres possédant de multiples talents et, d’une certaine manière, déjà homme de lettres par sa formation en enseignement du français et de l’histoire, Jeanfrançois Cossette s’est lancé dans une folle et belle aventure il y a maintenant presque un an : écrire une pièce de théâtre avec l’idée de ne pas se censurer et de croire que tout est possible dans la scénographie.
Dans Fiasco!,les personnages sont eux-mêmes des comédiens amateurs qui ne sauront tarder à vivre l’enfer lors de la première représentation de leur pièce. En effet, cette soirée sera pour eux un échec complet. La pièce est une adaptation libre d’un film américain assez populaire dans les années 1990 (bon nombre le reconnaîtront rapidement). Certains sauront aussi reconnaitre l’inspiration de la production présentée en ce moment sur Broadway à New York, The Play That Goes Wrong.
Rencontrés quelques heures avant la « grande première mondiale », les membres de la distribution étaient très heureux d’enfin présenter au public la pièce qu’ils répètent régulièrement depuis un peu plus de deux mois. Sonalie Hénault, jeune femme de 17 ans cumulant déjà 9 ans d’expérience en arts dramatiques, s’est dite très fébrile à l’approche de la représentation. Même si elle s’est jointe à l’équipe in extremis, Sonalie s’est bien intégrée. Pour la jeune comédienne qui termine à peine ses études secondaires, c’est un réel défi de travailler avec des comédiens d’expérience hors du cadre scolaire ou amateur.
UNE EXPÉRIENCE THÉÂTRALE HILARANTE
La pièce commence en force avec un épanchement amoureux au cours duquel les comédiens se laissent aller dans un rituel qui rappelle ce qu’on a déjà vu lors de numéros d’art performatif. Interprétés par Julie Mercier et Cédric Poirier, les amoureux démontrent une magnifique complicité. C’est à la fois beau, émouvant et hilarant de les voir s’aimer ainsi… et on ne verra plus jamais la poterie de la même manière. Étienne Jacques, de son côté, interprète avec brio un personnage qui est de prime abord plutôt timide. Ce dernier doit jouer dans la pièce de théâtre un peu malgré lui dans un rôle très éloigné de sa personnalité naturelle. Jeanfrançois Cossette est, de son côté, plutôt méconnaissable dans son personnage de technicien de scène qui veut rendre service, mais qui ne semble pas réaliser tout ce que ça implique d’être sur scène en tant que comédien. Ce ne sera pas facile pour les autres de travailler avec lui…
La présence sur scène d’un nouvel invité spécial chaque soir amène du piquant pour les comédiens, dans la réalité comme dans la fiction. Cette variation sur le même thème constitue un élément audacieux, d’autant plus que le temps de répétition est extrêmement limité. Bien que les invités connaissent leurs répliques depuis environ un mois, ils ne disposent que d’une heure tous ensemble pour établir leur plan de match pour la soirée.
Tout au long de la pièce, les rires font allègrement entendre. Le jeu des comédiens régionaux est tout à fait à la hauteur. Contrairement à leurs personnages, ce ne sont pas des amateurs! Inversions dans les répliques, didascalies, décalages cocasses avec l’éclairage et répliques rendues par l’entremise d’un extrait de film enregistré sur bande sonore… tout ça parfois rendu avec quelques pointes d’émotion. Aussi simples soient-elles, toutes les situations deviennent l’occasion d’exagérations intenses pour le plus grand plaisir des spectateurs qui, normalement, seraient mal à l’aise devant de telles performances.
Bref, il faut le voir pour le croire. Fiasco! est une pièce de théâtre d’été digne de ce nom, et pour ceux qui l’auraient manquée, souhaitons que Chiens pas de médaille (l’OBNL régional producteur de la pièce) récidive pour quelques supplémentaires à l’automne.