On est repartis bredouilles et en beau fusil de l’hôtel de ville avec notre plan futuriste, fait en 3D, sur ce que pourrait avoir l’air le lac Osisko dans trois ans. Une oasis, plaque tournante des expériences socioculturelles avec une couche de peinture neuve sur les bancs de la presqu’ile. Le parfait alibi pour tous les kids qui passent trop de temps à regarder le bleu du ciel pixelisé à travers leurs maudits casques de VR (virtual reality).
« Mention rejetée! »
J’avais le poing fermé sur l’air qui était devenu lourd. La rage au cœur comme un hommage à Dan Bigras. La crédibilité ne vient pas avec des statistiques tangibles, ni avec l’expérience, ni avec un dossier que tu as passé trois mois à monter. Ça vient avec une barbe bien taillée et un costume dans les quatre chiffres. Avec une réputation et peut-être même l’ombre d’un géant sur ton château de cartes. Comme quoi monsieur La-Grosse-Poche n’a pas eu de misère à faire raser deux hectares de forêt pour construire un nouveau centre d’achats avec un 8e Tim Hortons et un 12e Dollorama d’dans.
« I Had a Dream! »
J’ai vu un food truck saisonnier servant du slow food sur le bord du lac avec de la bière de microbrasserie régionale, la construction d’une passerelle en mélèze qui passe de bord en bord du chaudron. Un club de balle molle féminin bien éclairé par des spots, gracieuseté d’Adria. Des courses de drones en plastique recyclé de cassettes VHS de la Ressourcerie. Projection de films sur planches de plywood, cours de yoga au lever du soleil enseignés par une ancienne contorsionniste du Cirque du Soleil, tir à l’arc sur des vieilles pancartes électorales. Toutes des idées mortes au son du marteau.
Je suis allé marcher autour du lac pour digérer la pilule de l’absence. Le fait d’avoir un cours d’eau devant moi me pousse à des idées. Me donne le gout de lui rendre justice. De contribuer au développement moléculaire des bactéries pour qu’elles deviennent un jour des poissons.
Je ramasse des cannes de Budweiser en attendant.