Alors que novembre étend son manteau blanc encore tout troué de rivières et de lacs non gelés, deux Abitibiennes exposent leurs œuvres au Cabaret de la dernière chance, à Rouyn-Noranda, depuis le 24 novembre, sur la thématique Territoire illimité.
Françoise Côté et Jocelyne Caron, toutes deux originaires de l’Abitibi-Ouest, portent en elles ces grands espaces, cette blancheur infinie, qu’elles traduisent, pour l’une dans de grandes toiles chargées de couleurs primaires et secondaires à l’image de ces ciels flamboyants typiquement abitibiens et pour l’une et l’autre des gris colorés de toutes les nuances subtiles des brunantes hivernales.
Toutes deux ont développé leur approche de cette thématique de l’espace abitibien lors de leur participation à l’exposition Les cinq plaisirs capiteux, au Centre d’art Rotary de La Sarre, à l’été 2009. Elles ont par la suite participé au projet visant à faire connaître les artistes de la région à Montréal, dans le cadre de l’événement AT@MTL en 2010, Excès et désinvolture.
Mais là s’arrête la similitude dans l’art des deux artistes. Françoise Côté présente 5 grandes toiles de 117,5 centimètres sur 167,5 centimètres, réalisées en acrylique, matière qu’elle «traite en transparence, par la superposition de plusieurs couches de peinture diluée à l’eau et au gel, en des taches qu’elle garde, enlève, refait pour en arriver à un résultat final très épuré», car, dit-elle «le processus créateur est une introspection sur qui on est, notre perception du monde, ce qu’on vit». Pour être née en Abitibi, pour y avoir vécu, l’avoir quitté, y être revenue, c’est donc son histoire à travers son regard sur la nature abitibienne. Elle a vécu et exposé ses œuvres à Sherbrooke et à Montréal et obtenu une bourse du Conseil des arts et des lettres du Québec.
Jocelyne Caron, quant à elle, présente des œuvres de formats variés, à l’encaustique, technique qu’elle travaille à chaud ou à froid, en utilisant des pigments finement broyés incorporés à de la cire d’abeille qu’elle ajoute, enlève, texture, gratte, pour finalement créer des empâtements tourbillonnant de mouvement. Sur cette lancée de grands paysages nordiques, «elle fait référence à l’espace et moins au paysage figuratif. Dans ses créations, elle s’échappe de la réalité pour aller ailleurs dans son imaginaire. C’est à ce moment que la magie opère : elle naît du chaos de ses émotions». L’artiste a exposé la suite de ses recherches picturales au Centre d’art Rotary de La Sarre en 2011, recherches qu’elle pousse au-delà de la matière. Ainsi, elle a su donner cette impression d’immensité, dans un tout petit format pour lequel elle a gagné le premier prix de peinture à la Biennale internationale d’art miniature de Ville-Marie, en 2010.
Nos deux artistes, toutes deux contemplatives de la nature abitibienne, ne nous laissent ni froids ni indifférents devant leur histoire à la fois si personnelle et si universelle.